Sénégal / Sculpture / Yakhya BaSE RELEVER ET SE REMETTRE À MARCHER

Ils sont fort et puissants, comme des forteresses dans des armures sombres. Mais en regardant de plus près… Un rhinocéros, un gorille, animaux aux regards apeurés, bêtes traquées, comme les humains le sont. Dans la sculpture d’Yakhya Ba, les bêtes et les hommes sont vêtus d’identiques lambeaux. Et c’est là sa première force de dire l’histoire qui est la nôtre, notre misérable condition, dans cette savane qui cesse brusquement de nous nourrir.

La dimension n’a donc qu’une très relative importance. Yakhya Ba impose une présence par le sentiment qui les habite, bien plus que par leur taille. Celle-ci frappe d’emblée et rappelle souvent les personnages d’Ousmane Sow, dans cette puissance physique qui introduit son sujet. Mais l’essentiel n’est pas là.

 » Mon travail me permet de surmonter mes peines et de trouver la force de résister et de transcender l’amertume.  » Yakhya Ba

Quand on l’interroge sur son travail, qu’on lui demande le pourquoi de ces figures fortes et fragiles, il parle de ce qui l’entoure et de la nécessité d’enregistrer la réalité. « Souvent nous ne nous rendons pas compte de la valeur réelle d’un moment jusqu’à ce qu’il ne devienne un simple souvenir. Grâce à mes réalisations, j’immortalise certains moments marqués par des situations difficiles où tout semble s’écrouler autour de moi. Mon travail me permet de surmonter mes peines et de trouver la force de résister et de transcender l’amertume.  » Le personnage se relève, à l’image de ces passants, la tête inclinée, visages d’ombres et de cendres, anonymes, comme le sont les marcheurs de Sow et ceux de Giacometti.

On n’imagine jamais, en croisant un humain, ce que ses mains ont vu, ce que ses pieds ont foulé de poussière et de cailloux tranchants. On ne le voit pas, tellement nos yeux sont tournés vers l’intérieur de nous-mêmes. La sculpture a cette capacité de sortir de l’invisible, la chose physique qui nous habite, bien plus que la taille, le poids et l’empreinte génétique. Notre humanité que le monde nous fait taire, notre cri rendu inaudible, la fatigue qui voile nos gestes et les fait comme des écharpes de brume.

Le travail de Yakhya Ba est justement là, dans un constat sans colère, sans cri, de l’évidente désolation et de la volonté de se relever. Un homme qui marche, une femme courbée sous un panier. Une route invisible qui part au travers.

« Les arts plastiques me permettent de voyager, de m’évader et d’explorer des horizons inconnus ; ils me révèlent à moi-même ». Yakhya Ba

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Roger Calmé (ZO mag’)
Photos DR et Yakhya Ba
Contact : Galerie Kiunga, Rue Raymond Poincaré, 33110 Le Bouscat.
Tél. : 06 62 90 79 71
(20+) Kiunga Galerie | Facebook

http://www.fondationblachere.org/residences/yakhya-ba-senegal/

Repères:
Yakhya Ba est né en 1972 à Dakar (Sénégal).
Il a fréquenté de 1995 à 1997 le Conservatoire National de Musique, de Danse et d’Art Dramatique de Dakar, avant de poursuivre en 1998 une formation de trois ans à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Dakar.
Il est représenté en Europe par la galerie Kiunga.

Expositions:
2019: Salon National des Arts Visuels, Dakar (Sénégal).
           African Art Beats Inaugural Exhibition, Washington DC (États-Unis).
2018: Dak’Art – Biennale d’art contemporain africain, Dakar.
2016: Emotions Célestes, Galerie Arte, Dakar.
           L’enfance, Musée de la Femme, Dakar.
           Fondation Friedrich Naumann, Dak’Art OFF, Dakar.
Résidences:
2020: Fondation Blachère, Apt (France).
2017: Fondation Blachère, M’bour (Sénégal).

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