Il faut pour le décrire les adjectifs de l’extrême fragilité. Sa vie tient à si peu. Pourtant il va. Dans cette quête, debout, il parcourt ce chemin, il tend ses mains et son regard. Cet homme n’est rien de moins que notre humanité dans ce déplacement qui sera son unique salut. Il n’y a aucune autre couleur sur les sculptures de Ndary Lô.
Se dépêcher de revoir les œuvres de l’artiste sénégalais que la galerie Magnin a ressorti pour cette exposition en duo avec les peintures d’Assane N’Doye. Deux démarches, deux visions qui jouent en opposition, aux deux extrémités du besoin et de la plénitude. Ndary Lô marque au fer l’extrême exigence. De cette façon, il a vécu, jusqu’à son terme. De cette manière, il assemble les tiges de fer et rend compte de ce mouvement, à la fois obligé et volontaire.
A quelques mois de sa mort en 2017, il disait de son travail : «Je ne fais que ça. Je ne parle que de ça. Je ne rêve que de ça. L’art remplit ma vie. Je deviens moi-même au contact de la sculpture. » Il faut relire ce que la galerie écrivait sur ces derniers mois de vie, alors qu’il a quitté le Sénégal, se faire soigner en France. Quel regard il pose alors sur la mise en page d’un catalogue. Cette volonté de dire avec exactitude le chemin. Ndary Lô l’a vécu ainsi, dans le quotidien de son œuvre. Parce que la vie de chacun(e) devrait être dans ce mouvement de l’homme debout, qui va au bout de lui-même ; qui va, malgré le vent, malgré la faiblesse, qui va seul ou en groupe. Parce que cette notion est centrale dans son travail. A l’ensemble, nous sommes liés, à ce nombre nous répondons. L’arbre est de cette dimension. Son tronc est un corps d’homme, ses branches tendues de mains et de visages.
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De cette manière il assemble les tiges de fer et rend compte de ce mouvement, à la fois obligé et nécessaire.
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Ndary Lo croit en l’homme (et en son Créateur) et cette représentation fragile est aussi celle de sa quête. Deux figures traversent ainsi son œuvre : le marcheur (solitaire et en groupe), puis en contrepoint, l’arbre, qui arrête le vent, qui interrompt l’aveuglante lumière du soleil. Un jour, le mouvement s’arrête dans le corps. L’homme s’assoit et regarde au travers du feuillage, le ciel qui se déplace, les nuages, les étoiles. L’inlassable mouvement.
« Mes sculptures, je les appelle nit (qui signifie personnage en wolof). Je ne sais pas consciemment vers où elles marchent mais ce qui est important pour moi, c’est leur mouvement. Je suis obnubilé par le mouvement, il faut que cela bouge.» Ndary Lo
RC (ZO mag’)
photos : by courtesy galerie André Magnin (Paris)
« Dakar, Dakar », Du 1er avril au 20 mai 2023, à la galerie MAGNIN-A présente le travail de Ndary Lo (1961-2017) en même temps que les peintures d’Assane N’Doye (1952-2019).
https://www.magnin-a.com/artists/365-ndary-lo/biography/
A lire aussi : https://zoes.fr/2021/08/12/senegal-sculpture-ndary-lo-linlassable-mouvement/
Repères
Ndary Lô est né en 1961 à Tivaouane (Sénégal). Après des études d’anglais, il suivit une formation de l’Ecole nationale des Beaux-Arts de Dakar.
En 1995, il remporte le prix du concours des arts du Goethe Institut de Dakar. Prix de la jeune création contemporaine africaine à la biennale de Dakar en 1996, Grand prix du chef de l’État pour les Arts en 1999, Grand Prix Léopold Sédar Senghor à la Biennale de Dakar en 2002 et en 2008…
Ndary Lô est décédé à Lyon (France) en 2017.
🖤🖤🖤
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Impressionnant,
Le temps que ça doit prendre pour avoir se rendu magnifique 🤩.
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