Est-ce que Dieu et l’homme sont à la même image ? S’il faut trouver une réponse à la série de Bakoo Coulibaly, on risque d’être très embêté. D’ailleurs, lui-même ne répond pas. Il se contente de renverser les corps et dans une lévitation élégante, il les oriente vers le ciel, invisible et permanent. Est-ce que la réponse se trouve à l’étage supérieur ?
A défaut de résoudre l’équation, on retrouve donc le travail du (jeune) photographe malien découvert (s’il vous plaît) par Françoise Huguier en 2019. Ses images de rue présentées lors de la Biennale (off) de Bamako (2022) ont pleinement convaincu. Bakoo a le sens du cadrage, et malgré des laboratoires locaux et basiques, il soigne au maximum ses tirages, grand format, dans un noir et blanc très précis, qui tire un avantage maximal des zones claires et obscures.
Cette fois, il change totalement de repères pour s’intéresser au corps, le plus souvent masculin, et toujours en noir et blanc. Un exercice difficile, d’autant qu’il choisit un traitement quasi académique, digne d’une classe des beaux-arts. Au final, il s’en sort plutôt bien, en restant au plus près du sujet, traité d’une manière strictement plastique. On pourrait presque dire que son observation pourrait être celle d’un sculpteur. Michel-Ange devait imaginer ainsi les possibles positions de ses personnages, aux prises avec le récit mythologique. Dieu, la créature et l’impossible dialogue, et l’impossible question, et cette résignation finale, puisque nous sommes (et pour longtemps) dans l’impossibilité d’y répondre.

… dans une lumière qui va s’arrêter, dans un éclair qui risque bien de les foudroyer.
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Seulement, la leçon reste glaciale tout de même. Ces corps séquentiels ont du mal à émerger de l’immobilité. Il pèse sur eux un sommeil de pierre. Peut-être est-ce la volonté de Coulibaly de rendre l’impossibilité du mouvement, du sentiment, et plus largement de cette ressemblance du Créateur et de la créature. L’homme ne sera jamais Dieu. Qu’il ne se fasse aucune illusion. Et c’est finalement de cette tristesse décalée dont parle l’image. Des hommes de marbre… comme les idéologies illusoires les proclament. Les images en ce sens atteignent l’objectif. Ce ciel auquel ils aspirent leur reste tellement lointain. Leur couleur est celle de la fin du monde, dans une lumière qui va s’arrêter, dans un éclair qui risque bien de les foudroyer.
« Si l’homme est à l’image de Dieu »
RC (ZO mag’)
Photos : © Bakoo Coulibaly
Contact : (20+) Bakoo Coulibaly | Facebook

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Repères
Bakoo Coulibaly est né en avril1992, à Kanassako, cercle de Niono (région de Ségou, Mali). Après ses études au lycée, il se dirige vers la photographie par le biais de sa grande sœur.
En 2016, Bakoo intégre « Yamarou Photo vestibule de la photographie d’art ». Deux ans plus tard, il participe à un atelier photo avec un photographe français, Philipe Guionie, abouti par une exposition collective à l’Institut français de Bamako. En 2019, il participa à un atelier photo avec la photographe française Francoise Huguier. Plus récemment, il intègre le groupe «Invisible Borders» et participe encore à la biennale de Bamako.
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