Face à la mer qui brise des couleurs et les applique sur le ciel, Chaimaa Mellouki pense d’abord à ce que la toile enregistre de ce tumulte. Tout est prétexte à dire et écouter ce que la peinture lui donne. A la question qu’on lui pose sur le sens de cette abstraction, elle a l’impression que la réponse n’est pas là. Plutôt que de connaître la raison, il faut se pencher sur le « comment ». C’est le « cœur » peint qui tient le sens. Chaimaa Mellouk se déplace. Ses pieds s’imprègnent de la couleur, et la toile imprime le déplacement. Certains diront expérience. Sans doute, à l’image d’une plongée, dans une région de soi où la dénomination n’existe que de façon relative.
Mais la spécificité de ce travail est bien de refuser le recours systématique à un système. Chaimaa est hors la mécanisation. Elle va au-devant de la couleur et de la forme, comme d’un territoire en devenir. Un instant plus tôt, dans son cheminement de peintre, on peut penser qu’elle l’ignore. Elle pose alors des repères, et elle constate que ces lignes peuvent interagir, développer une esthétique, donc un langage propre… et qu’elle est à même de le comprendre. La peinture ne peut pas exister sans cette observation raisonnée de ce qu’elle est, d’où elle vient, de ce qui la compose et de l’hypothèse d’un but. On serait alors étonné d’entendre sa réponse si on lui disait à qui certaines de ses toiles fait penser. Mais ce n’est pas d’influence qu’il est question. Si cette torsion du bleu rappelle Joan Mitchell (ici), si ces croisements carrés peuvent reprendre certaine période de Klee ou de Rothko (ailleurs), Chaimaa n’a certainement pas agi comme le ferait une copiste. Elle en est arrivée, picturalement, à des conclusions similaires.

Triptyque Océan 0, 70 x 0, 75m, 2021.
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Les éléments qu’elle a présentés il y a un an, sont doublement intéressants. Ce n’est pas la couleur bleue (aussi belle et émotionnelle soit-elle) qui attire l’attention. Mais l’observation très attentive de ce qu’un flux génère d’émotions et de décisions. L’eau, l’air, le sentiment de la même façon, peuvent circuler ainsi. Le triptyque que Chaimaa Mellouki a réalisé est en ce sens révélateur. S’agit-il d’une vague, une fraction de l’océan, ou d’un immense paysage, de montagnes glacées et lumineuses ? On peut aussi bien percevoir l’un que l’autre. Chaimaa figure d’une façon identique l’écume et les pentes minérales. Rien n’est arrêté. La peinture est dans le flux que le sens suggère. Elle en fait l’écho. Elle témoigne de l’immensité plane ou de celle qui se dresse, dans le mouvement généré par la lune (marée) ou les plaques tectoniques (jaillissement des reliefs). L’unité de temps est la même. Une seconde ou une éternité, d’un lieu imaginaire et originel, qui est nous, qui est notre environnement, et la volonté de création.
« J’explore les styles au gré de mon imagination et de mon processus créatif. Je ne mets aucune restriction dans mon travail et je n’hésite pas à aller en terrains inconnus. « Chaimaa Mellouki.
Roger Calmé (ZO mag’)
Photos : © Chaimaa Mellouki
Repères
Chaimaa Mellouki est née en 1983, à Nanterre (France).
Elle est licenciée de droit Erin, master en criminologie. A suivi des cours d’arts plastiques au Museum of Modern Art (MOMA) de New York, à l’Université de Florence (Italie) et à l’université de New York (USA) (source Espace Rivages).
Exposition :
2022 : “Première Symphonie”, Espace Rivages, Fondations Hassan II, Rabat (Maroc).
2021 : galerie Tennich, Azrou (Maroc).
💙💙🎨
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Très beau travail de Chaimaa Mellouki.
Son travail serait très bien reconnu dans ma galerie.
Est-il possible de lui transmettre et d’avoir son contact?
P.SIMON
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