Dans le creux de la main, la tache de mehndi agit efficacement contre le mauvais œil. C’est ainsi que le mot se dit en ourdou. Cette marque présage du bonheur, tout comme elle peut guérir des blessures et de la douleur. Dans cette image qui est collective, Nada Chahed place les deux mains, baignée d’encre, sur le ciel blanc, à la rencontre l’une de l’autre. La main tendue, la sollicitude que l’on partage, dans cette existence faite de signes et de silence. C’est de cette manière que la vie, la parole, le sens, vont d’une berge à l’autre, d’un paysage à celui qui lui succède. Une main tendue et chanceuse à la rencontre de l’autre, sans laquelle elle n’est rien. La rencontre est un pilier des cultures africaines, où le corps ne rencontre aucune limite. L’existence est dans cet échange nécessaire, la complémentarité, la reconnaissance des différences. Ubuntu dit-on, en langue bantu.
Sur ses vidéos, dans ses animations de couleur bleue, Nada Chahed parle de cette confluence. La vague est de la même couleur que le ciel, dont elle renvoie l’image, qu’elle reçoit et qu’elle partage. Il faut revoir l’ensemble des signes, dans cette logique du don. Le ressac en est une palpitation. La vague, sa main liquide, un voile qui enveloppe le sable pâle. Abstractions ou résonnances, sans contour autre que le sens. Les deux mains vont à leur propre croisement, eau, ciel, fleuve, vent, et aucun mot n’en altère la volonté sans cesse répétée. On dit parfois que Dieu a eu ce geste en direction de sa création.
La photographie, réalisée selon le scénario de Nada, répond à l’écho. Sur le plafond bleu d’une chapelle, dans un autre siècle, une figuration sans visage, une intention de bonté, entre elle et Lui. Une main dans le ciel blanc, comme l’est cette mer qui unit les rivages : mer blanche, main noire.
Photo : Kawther Mahjoubi
RC (ZO mag’)
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