Tunisie / Plasticien / Hamda Saidi / PLUS QU’A UN FIL

Fil de laine, de coton, fil synthétique, fil à coudre, à broder, à rapiécer, chirurgical, tressé et câblé, fil barbelé : de fil en aiguille, le tissu se fait et se défait, le fil se déroule, se lie et se coupe. De cette évidence, le travail d’Hamda Saidi s’inspire. Ces dernières semaines, il le poursuit avec ses élèves dans son atelier de Tozeur (sud tunisien). Créer sur l’idée du tissage et de la vie nécessaire à cette entreprise. Les divinités l’ont voulu ainsi dans la mythologie, rappelle-t-il en introduction. Nona, Decima et Morta, filles de Zeus, avaient la charge de juger de notre destin. Et de rappeler aussi le songe d’Arachné, qui osait défier Athéna dans l’art de la tapisserie, et qui fut changée en araignée, suspendue… à sa toile.

Nous n’en sommes pas encore à cette extrémité, mais en pleine réalisation du « rouleau », sur lequel le plasticien met en anecdotes peintes et dessinées, les accidents de notre vie. Le dessin d’Hamda Saidi se prête si bien à cette figuration (souriante et lucide) de nos vies contemporaines. Les amours d’aujourd’hui ont d’autres motifs que celles de l’Antiquité, mais le résultat est tout aussi symbolique. La danse participe du même évanouissement, et les corps pendulaires affrontent en pleine lumière les conséquences de l’hypnose. D’autre histoires surviennent que leur conscience a laissé filer. Un point à l’endroit, un point à l’envers, jusqu’au niveau le plus extrême, qui est le rebord d’un meuble de télévision (ou d’une falaise), et qu’aucun ourlet n’arrête. Dans cette obscurité promise, nous dit-il à l’oreille, « il nous reste ce fil (d’Ariane) qui permettra de retrouver son chemin. »

« J’ai mon rouleau de papier, je le mets devant moi, je dessine des lignes tissées, nomade que je suis, des écritures… Je roule, je déroule, comme l’artisan devant sa tapisserie, dans une suite de scènes, une succession de paysages, un parcours… »

Dans quel sens, faut-il le lire ? Convient-il à présent de l’enrouler ou de le dérouler, ce considérable rouleau qui atteint désormais (c’est-à-dire dans un passé relatif) la longueur de 180 mètres ? Hamda Saidi se penche et il retient de la pointe de son crayon, d’un geste rapide, il retarde, il anéantit l’idée de la chute. Les Dieux deviennent fous. Les Dieux rigolent. Ils se tiennent les côtes. Et les chèvres mythologiques aussi, montées sur les toits, qui regardent le Rouleau par le trou de la cheminée.

RC (ZO mag’)
Photos: Hamda Saidi
Contact: https://www.facebook.com/hamda.saidi.5

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Un commentaire sur “Tunisie / Plasticien / Hamda Saidi / PLUS QU’A UN FIL

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  1. J’ai bien lire, c’est un beau texte qui touche ma pratique et je l impression que votre texte aussi une oeuvre pralelle à ce que je fait comme ligne. Je vous remercie pour votre engagement dans le champ artistique et le grand effort pour aider les jeunes artistes qui ne sont pas dans le circuit

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