Cameroun / France / Photographie / Simon Njami / UNE ENVIE DE VOMIR

Il faudrait un jour demander à Simon Noami quel était le paysage photographique en 1991, quand il fonde avec Jean-Loup Pivin, Pascal Martin Saint Leon et Bruno Tilliette, la Revue Noire. L’intention était on ne peut plus claire : « On voulait redresser les bêtises qu’on entendait, inscrire l’Afrique dans le monde », indique Simon Njami. L’aventure va durer dix ans. Dix ans pour remettre le sujet hors et dans le cadre, lui redonner sa fonction, son rôle figuratif, dix ans de discussions passionnées et qui brusquement se sont éteintes.

Il y a quelques semaines, la Biennale de Bamako rend publique ses artistes. Ils viennent de partout en Afrique, de ce métissage qui est le constat le plus honnête qui soit. Personne n’a parlé de Bamako, ce lieu à l’origine duquel Françoise Huguiez s’est si longtemps décarcassée. Pas un mot. Pas plus qu’on ne parle de la photo en Afrique du sud ou au Nigeria, et Dieu que le travail de Zanele Muholi ou de Lebohang Nganye le mérite, et pour ne rien dire de David Goldblatt et Pieter Hugo. Le silence. L’immobile obscurité.

Contrairement au portrait psychologique, le portrait de studio produit des simulacres, des artifices, de la surréalité. S. Najmi

Bien sûr, il y a Arles, c’est-à-dire trois photographes, parfois un curateur, et le plus souvent des ignorants, en peine de géographie qui ont du mal à citer d’autres noms que ceux de Seydou Keita ou de Malick Sidibé. Quelle solitude doit être la leur, à ces messieurs du studio, et sur lequel Njami a écrit avec un réel talent.

« (…) Le photographe va transformer son studio en cet espace un peu magique au sein duquel va s’effectuer une opération qui n’est pas loin de la transsubstantiation, dans la mesure où il va transformer une réalité en une fiction « réelle ». Contrairement au portrait psychologique, le portrait de studio produit des simulacres, des artifices, de la surréalité. »Juste ces quelques lignes.

« Au fil des années, j’ai commencé à comprendre que si nous voulons changer la façon dont le monde perçoit l’Afrique, nous devons développer de nouveaux talents africains par le biais de l’éducation, »

Nous aurions voulu produire des phrases optimistes et non  mercantiles. Quand Christophe Person s’assoit dans son bureau d’Artcurial, il parle de la « visibilité nécessaire ». Qu’on lui rappelle, petit bonhomme, combien la visibilité manque ici, entre Paris et Londres, et certainement moins de l’autre côté de la Manche. La visibilité, ouverture maximale, vitesse au 250ème et prise de position pleine de sens, d’engagement, de correction, à l’image de ce que le Maroc produit. Person est un homme qui porte de jolies chemises. Il a un sourire discret, le gris lui va très bien. Il faut jeter un œil à son catalogue, tout comme à la collection d’Actes Sud Photo Poche et son unique Africain Samuel Fosso. En mars 2022, vente Artcurial, Seydou Keita atteignait la somme de 63 700 dollars. Jean Dépara l’accompagnait, Sidibé aussi et Mario Macilau (Mozambique). Ce fut tout. L’Afrique ne photographie pas. Elle regarde sur ses écrans de téléphone les publicités pour l’électroménager ou des films de cul : elle consomme.  Arrêtez de vous foutre de nous !

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A lire : Studio photography / Text Simon Njami – avril27
Roger Calmé (ZO Mag’)

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