Il faut rassembler les morceaux. Ouvrir des portes et laisser entrer les ombres et les lumières qui vont avec. Est-ce un hasard, si au moment où le monde se referme, mangé par la peur, Daja Do Rosario prend un chemin inverse ? Cap Verdienne d’origine, installée sur la côte varoise (France), elle voit aujourd’hui son travail comme une recouvrance d’image. De rassembler alors, de recoller, et de produire une figuration d’elle-même, plurielle, vivante, possible et affirmée.
Rassembler les personnes qui sont au commencement de son histoire. La photographe évoque volontiers la figure de sa grand-mère maternelle. « Notre histoire familiale est peu narrée. Les personnes ne racontaient pas. Par contre, il avait cette femme qui me berçait de ses récits, une femme très moderne, blanchisseuse et guérisseuse, et dont on a conservé les photographies. » A partir de ces images multiples, Daja recompose peu à peu son paysage intérieur… avant de le figurer par la photographie, dernière étape de ce voyage aux origines.


La difficulté qu’elle a éprouvée, enfant, à s’intégrer à l’environnement français, est certainement l’autre origine de son travail. Sous ces masques fictifs, empruntés à des croyances africaines, c’est elle qui est mise en scène. Reine ou guerrière, femme ou homme, les images, le récit visuel, redonnent la possibilité d’être. Dans ces rochers rouges de la côte varoise, une sorte de jardin secret se crée. Un espace de la réconciliation, laisse-t-elle entendre. « J’ai un rapport très proche à la Nature, à ce qu’elle nous propose d’essentiel. Nous avons à reconstruire ce lien. » Et d’évoquer là encore, la connaissance que son aïeule avait des plantes, des potions, de cette magie nécessaire à l’équilibre du corps et de l’esprit.
En trois ans, le travail photographique a ainsi muri. Il met ainsi à jour toute une mythologie tressée de paille et de bois, de corps renversés, pris dans le maillage spirituel. Est-ce une femme, ou bien un homme, sur cette terre blanche et sèche, la peau noire qui brille d’une lumière liquide ? Plurielle et possible. Libre. Les portes s’ouvrent, les conversations commencent.
« Je raconte ainsi au travers de mes photos mon histoire – que je mêle et confronte à la Grande – à travers des autoportraits où je me met en scène, revêtue d’objets fabriqués avec émotion. Dans ces clichés, apparaît un nouveau personnage, qui n’est plus tout à fait moi. Isabelle s’efface alors derrière Daja Do Rosario. » Isabelle Legares.

RC (ZO mag’)
Photos: Daja Do Rosario
A voir: https://www.dajadorosario.com/
isabelle_legares@yahoo.fr
Repères:
Daja Do Rosario (Isabelle Legares) est une photographe autodidacte.
Sa formation est un collage d’expériences liées à son vécu familial, sa mixité culturelle et le travail dans la mode.
Expositions:
2022 : Galerie Clavo, Roma Norte, Mexico (Mexique).
Workshop, Museo Privado, Mexico, Mexique.
Circulación (performance), Casa Sanagustin, centre d’arts, Oaxaca.
Exposition et workshop Museo Mufi, musée de la philatélie, Mexico.
Triennale Nylaat, college art gallery, Queens, New York, USA
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