France / Photographie / Françoise Huguier /LA LUMIERE PARTAGEE

La photographie pose un point d’équilibre. Elle tient à la fois de la fiction (potentielle) et du témoignage (documentaire). Un instant elle s’échappe et la seconde d’après elle reprend pied. Au commencement de cette relation photographique et africaine, on dira que Françoise Huguier est reporter photo. Les années 80 ont été formidables. Des rédactions de journaux ont compris que l’image avait une histoire à raconter, complémentaire de celle du récit écrit. Pour le quotidien Libération et l’agence VU, Françoise Huguier inscrit sur la pellicule ce qu’elle voit de ce monde. L’Afrique est venue de cette façon dans son boîtier. Et en particulier, par le biais d’une traversée d’ouest en est, entre Dakar et Djibouti. La première datait des années trente et constituait un « classique » de l’expédition ethnologique. Françoise Huguier va la revisiter entièrement. « Sur les Traces de l’Afrique fantôme » tient d’une restitution de l’image.

Au travers de ses différentes séries (Colombie, Afrique du sud, Mali, Russie, Cambodge…), il ne s’agit pas d’étiqueter les communautés, de les mettre dans la vitrine muséographique, mais de partager des moments de vie. L’image n’est plus un polaroïd identitaire, mais un instant mélancolique, poétique, graphique, dans une interaction sentimentale et existentielle. « J’ai parlé aux gens, je suis entrée dans les maisons, dans les chambres des femmes qui renferment tous leurs secrets et j’ai écouté. J’ai ainsi gagné le droit de photographier leur vie, dans l’intimité, la simplicité et le respect partagé. Ce sont des regards de femmes qui vous captivent, recueillis dans l’abandon d’un coin de lit. Chaque photographie trahit la complicité. », dira-t-elle de ce temps apprivoisé.

« Sur les traces de l’Afrique Fantôme ». Pêcheur Boso sur le fleuve Niger, Tombouctou, 26 février 1989. Françoise Huguier / Agence VU.

Les photographies montrées à la galerie Art-Z (Arles) datent des années 90. Au moment même où elle initie les Rencontres photographiques de Bamako, Françoise a démarré un travail sur les femmes maliennes et burkinabés, au travers de l’espace privé. Des images blanches et noires, intimes, d’une épure vertigineuse, dessinés d’une ligne de lumière, comme d’un charbon acéré. On pense évidemment à Seydou Keita ou à Malick Sidibé. L’un pour sa mélancolique élégance et le second qui inspire une fraternité du regard.

« Secrètes ». Pays Lobi. Françoise Huguier / Agence VU

Les femmes de Françoise Huguier ont beaucoup de choses à raconter, mais elles regardent au-travers de l’objectif, dans une distance permanente. Il y a une chose que la photographe réussit à capter, tout comme ses confrères d’Afrique de l’Ouest : cette grande pudeur, cette réserve réciproque. En cela, Françoise Huguier perpétue l’image du studio des années 60. L’image est fidèle à une réalité consentie et partagée. Et c’est justement la question contemporaine que les photographes aujourd’hui mettent au centre de leur travail. Un partage de l’image, une construction commune.

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Secrètes, de Françoise Huguier, Galerie Art-Z, Arles 2022, du 2 Juillet au 25 Septembre 2022.
Invitée d’honneur: Françoise Huguier, fondatrice des Rencontres de Bamako.

RC (ZO mag’).
Photo : Françoise Huguier, by courtesy Art-Z.
A lire: https://agencevu.com/photographe/francoise-huguier/

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