Petits regards vers hier. La recherche photographique de Lebohang Kganye entretient des rapports très étroits avec le souvenir familial. Dans son premier travail, elle retrouvait le contact de sa mère au travers d’un dédoublement d’images. Sa disparition brutale l’avait beaucoup marquée et cette réminiscence par la photographie l’aidait à supporter le moment. Mais au-delà de la sphère privée, il s’agit aussi d’une réflexion sur le temps en Afrique du sud, et la confrontation permanente des époques, du présent et de la mémoire.


Aujourd’hui, le pavillon sud-africain l’invite à la Biennale de Venise où elle présente un travail très étonnant sur son enfance. « Dans B(l)ack to Fairy Tales » est une exploration des légendes, imaginées par des Occidentaux, et que les enfants tentent de s’approprier. Lebohang Kganye en a tiré une série assez angoissante, qui montre son malaise rétrospectif. Elle reflète à quel point « les idées de romance et de dénouement heureux […] sont en contradiction avec le fait que j’aie grandi dans un township noir ». La mise en scène se déroule dans la maison de sa grand-mère, où elle apparaît, la peau peinte et les lèvres passées au rouge. Le malaise est renforcé par l’éclairage et la mise au point qui transforment ces images en des séquences proches du cauchemar.
» les idées de romance et de dénouement heureux […] sont en contradiction avec le fait que j’aie grandi dans un township noir » Lebohang Kganye
Lebohang Kganye poursuit donc, série après série, cette recherche de mémoire dont le corps social est partiellement privé. Plusieurs films et expositions se sont ainsi succédés, depuis Pied Piper’s Voyage, 2014), qui évoquait le voyage pédestre de son aïeul au travers du pays. De la même façon, Dipina tsa Kganya (2021) joue sur ces possibles retranscriptions. Dans l’univers de la photographe, les voix se superposent. Elles viennent de ses ancêtres, du pouvoir, de la narration officielle et de la sienne propre, observatrice et productrice de sens. Après tout, en langue sotho, Kganye signifie «lumière».
,

« Into the Light » , Roger Ballen, Phumulani Ntuli, Lebohang Kganye , pavillon de l’Afrique du Sud, Biennale de Venise.
Roger Calmé (ZO mag’)
Photos: Lebohang Kganye
A lire aussi : Afrique du sud/ Photographie / Lebohang Kganye / EST-CE QUE CA EXISTE ENCORE ? (zoes.fr)
Et encore l’article de Marie Meyerding, dans l’Oeil de la photographie :
59e Biennale de Venise : Lebohang Kganye : Once Upon a Time (loeildelaphotographie.com)
Passionnant ! Bouleversant ! Dérangeant ! Comme j’aurais voulu voir ce travail artistique de mes yeux, merci beaucoup pour votre article (et les autres), très bonne journée
J’aimeAimé par 1 personne
Louise, c’est de plus en plus précis,
Les gens sont partout ds des questions de ce type (moi, le monde, le temps qui file…), là où un brin de curiosité subsiste.
J’aimeJ’aime