Maroc / Exposition / Tahar Ben Jelloun / LES OISEAUX SONT CALLIGRAPHES

Sans doute est-ce le chemin qui va ainsi. Dans cette proximité de l’écrit et du peint, toute une vie se résume.. Trempés à la même encre. Un homme, un chemin et la lumière qui baigne ses pas. Tahar Ben Jelloul montre à Casablanca (Atelier 21) ses dernières toiles, réalisées entre 2021 et 2022. Elles pourraient illustrer un livre que l’écrivain publie en même temps et qui porte le même nom que l’exposition, à savoir la « couleur des mots ». Le livre et la peinture parlent de ça, comment aller de l’un à l’autre, porteurs des mêmes syllabes lumineuses, l’ocre et le bleu, le pas de l’âne qui résonne, ma terre, ma médina peinte, les mains de ma mère, la terre sur les vêtements, le parfum de l’eau qui coule dans le vert. Fermer les yeux et les ouvrir.

« C’est une histoire qui a commencé à l’enfance à Fès », écrit-il dans cette préface qui est elle aussi indispensable. « Heureux d’être là », titre-t-il. Pour remercier ce ciel qui l’accompagne, comme le font les livres et les films, qui disent son chemin d’homme. La peinture est sur cette route, en point cardinal, elle l’a toujours été. « À chaque fois, j’explique comment je passe de l’écriture (et) « la douleur du monde » à sa « lumière ». J’ai souvent écrit sur les injustices, sur la solitude, sur l’abandon (…). C’est là où la peinture, telle que je l’aime, s’est imposée à moi comme une évidence, comme une vieille rencontre, une amie éclairant mon chemin. »

Peints sur deux ans, ces tableaux sont un hommage à la terre et au ciel.

Heureux. D’être revenu de Paris à Marrakech dans cette abondance de l’ombre et de la clarté, sous ce ciel sans avarice. Paris est une belle ville triste, à l’image de ceux qui l’habitent. Heureux d’être revenu dans ses rues et de les peindre en losanges limpides, d’une nature qui échappe un peu à ce monde. « J’ai essayé de faire appel à la joie, à la danse, à l’extase sur le chemin de la spiritualité. Heureux de montrer ce dernier travail fait chez moi à Tanger et à Marrakech spécialement pour L’Atelier 21. Heureux d’avoir peint sous le soleil de mon pays, avec sa lumière et sa grande générosité comme guide. »  Cette compréhension n’est pas une révélation subite. Elle était là au commencement. Elle l’a aidé à comprendre et à écrire, à raconter et mettre sur la toile ce qu’on retient, au moment où le chemin vient à son terme. Que la lumière lui soit douce !

Dans cette peinture, les oiseaux sont calligraphiques, l’eau du torrent est une synthèse d’aplats et d’équilibre. A l’arrière de l’ombre, monte un figuier, ou le parfum du jasmin, qui enroule de la même façon les mauves et les violets. Rien ne manque.  On dit de Matisse qu’il est resté enfermé dans une chambre plusieurs semaines, à attendre que la lumière revienne. Que la grisaille cesse, que la pluie s’arrête, que ce monde d’écriture et de souffrance cède enfin le passage au rayon lumineux. Choukran M. Ben Jelloun.

« Heureux d’avoir peint sous le soleil de mon pays, avec sa lumière et sa grande générosité comme guide. « 

« À chaque fois, j’explique comment je passe de l’écriture sur ce que j’appelle « la douleur du monde » à sa « lumière ». J’ai souvent écrit sur les injustices, sur la solitude, sur l’abandon. Mais j’avais besoin d’explorer l’autre face de cet univers sombre. C’est là où la peinture, telle que je l’aime, s’est imposée à moi comme une évidence, comme une vieille rencontre, une amie éclairant mon chemin. » Tahar Ben Jelloun.
« La couleur des mots », Tahar Ben Jelloun, du 10 au 30 mai 2022. Galerie L’Atelier 21, Casablanca.

En haut : « Dans mon pays, le ciel est rarement avare », technique mixte sur toile, 100 x 210 cm (2020)
« La couleur des mots », Tahar Ben Jelloun, du 10 au 30 mai 2022. Galerie L’Atelier 21, Casablanca.
Roger Calmé (ZO mag’)
Photos : by courtesy Atelier 21 et © T. Ben Jelloun

Repères :
Tahar Ben Jelloun est écrivain, poète et peintre, né en 1947 à Fès. Après avoir fréquenté le lycée français de Tanger et étudié la philosophie à l’université Mohammed V de Rabat, il partage sa vie entre le Maroc et la France.
Tahar Ben Jelloun a nourri une proximité permanente avec les arts plastiques. Ses écrits se sont intéressés à plusieurs peintres et sculpteurs marocains comme Farid Belkahia, Mohamed Melehi, Mohamed Chabâa, Fouad Bellamine, Chaïbia Talal, Jilali Gharbaoui, Mohamed Kacimi et sur plusieurs artistes étrangers à l’image de Henri Matisse, Alberto Giacometti, Claudio Bravo.


Principales expositions personnelles
2022 : La couleur des mots, galerie L’Atelier 21, Casablanca, Maroc
2021 : Villes rêvées, galerie Patrice Trigano, Paris, France
2020 : Travaux récents, galerie Tindouf, Marrakech, Maroc
2019 : Ville Méditerranée, galerie Patrice Trigano, Paris.
2018 : Cultural Crossroads, La galerie Nationale, Dubaï, Émirats arabes unis
     J’essaie de peindre la lumière du monde, Musée des Beaux-Arts de Nancy, France.
2017 : J’essaie de peindre la lumière du monde, carte blanche à Tahar Ben Jelloun, Institut du monde arabe, Paris.
     Abouab, galerie Patrice Trigano, Paris
2015 : Travaux récents, galerie du Passage, Paris.
     Travaux récents, Palerme, Bologne, Milan & Turin, Italie.
2014 : Écrire Peindre, galerie Tindouf, Tanger et Marrakech, Maroc.
     Écrire Peindre, Musée San Salvatore in Lauro, Rome, Italie.
1989 : Travaux récents, Turin, Italie.

Principales expositions collectives
2021 : Art Paris Art Fair, galerie Patrice Trigano, Paris.
2019 : Galerie Olivier Castaing, Paris.
     Les mots et les lignes, espace Art Absolument, Paris.
     Le Palais Fesch-Musée des Beaux-Arts, Ajaccio, Corse.

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