Mozambique – Italie / peinture / Bertina Lopes / TROIS SILHOUETTES ENTRE OMBRE ET LUMIERE

Quand Bertina Lopes s’installe en 1964 à Rome, l’atmosphère artistique est sensiblement différente d’aujourd’hui. Uzo Eguno (Nigeria) a connu une situation similaire après-guerre à Londres, où les galeries étaient fermées aux artistes africains. Pour repère, en 1963, le groupe auquel elle appartient a quitté la Biennale de Sao Paulo. Les organisateurs pensaient qu’ils devaient représenter le Portugal et en aucun cas le Mozambique. Alors que les mouvements anticoloniaux donnent pleinement de la voix, le microcosme artistique demeure sourd et muet. On peut donc dire que Bertina Lopes est l’une des très rares créatrices qui fasse entendre et voir son travail. Et c’est d’autant plus vrai pour ses recherches abstraites qui ont rencontré de considérables difficultés. L’Afrique doit-elle se limiter à montrer des figurations animalières ou d’ordre folkloriques ?

Ce qu’elle disait reconnaître en Picasso….

C’est, de façon très similaire encore à Egonu qu’elle présente des toiles comme « i Tre momenti » (1988) qui sont des silhouettes lumineuses dans une opposition de clarté et d’ombre. Cette séquence verticale pose de manière très juste une scène moderne, urbaine, à l’arrêt d’une époque qui hésite. On a totalement dépassé la figuration cubiste. Cette synthèse est certainement l’une des plus atypiques de son travail, et elle témoigne de cette volonté inébranlable de combler les fossés. Son abstraction peut garder de puissantes attaches africaines (voir Totem-1979) et venir sur ce terrain plus occidental, dans le dépouillement maximal, sans rien perdre de sa pertinence.

Cette capacité de tout voir, de tout appréhender librement, permet ainsi de grands écarts. Bertina Lopes peint aussi bien la nécessaire libération (Racine ancienne-1960) que l’épure minimaliste. Libre, d’engager sa peinture dans des chemins différents, de vivre entre l’Europe et le Mozambique, et de travailler de manière permanente à la paix. Une artiste qui demeure dans son temps social et politique. Elle sera encore dans les années 90 à l’origine du rapprochement entre les factions militaires du Frente de Libertação de Moçambique (FRELIMO) et de la Resistência Nacional Moçambicana (RENAMO). La paix, la peinture, une rue solaire de Maputo et trois silhouettes, entre ombre et lumière.

RC (ZO mag’)
Photos: Bertina Lopes and by courtesy Richard Saltoun.

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Repères:
Bertina Lopes naît le 11 juillet 1924 à Lourenço Marques (l’actuelle Maputo, capitale du Mozambique). Sa mère appartient à une famille locale distinguée et son père est un colon portugais. Elle a fait pour partie ses études dans la capitale, puis à Lisbonne où elle a étudié la peinture et le dessin.  Entre 1945 et 1949, elle étudie la lithographie et la peinture décorative à l’Escola Secundária Artística António.  Elle étudie également la peinture à l’École supérieure des Beaux-arts de Lisbonne.
Elle est décédée en 2012.Principales expositions individuelles:
2006: Rétrospective organisée par le Ministère du Patrimoine et des Activités culturelles, Musée de la ville de Rimini et aux Archives centrales de l’État, Rome (Italie).
2002: Rétrospective de son œuvre à l’occasion du 10e anniversaire de la signature des accords de paix avec le Mozambique, palais de la Chancellerie, Rome.
1986: Palais de Venise, Rome.
1982: Musée national d’art du Mozambique, Maputo.

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