Maroc / Plasticienne – Broderie / Sara Ouhaddou / LA TRAME DE CE RÉCIT

Au départ, l’objet participe d’une sorte d’alphabet poétique et spirituel. Une broderie, une céramique, la forme d’un pot sont des échos de l’environnement, tels que le ciel, l’eau ou la montagne les donnent à regarder. Sara Ouhaddou est une plasticienne sensible à cette spiritualité du lieu et de la culture initiale. Mais elle est aussi par son histoire personnelle, entre la France et Meknès, dans la compréhension des rencontres. Il n’existe aucune étanchéité entre les cultures.

En 2019, elle a ainsi travaillé pendant quatre mois au FRAEME (Marseille), sur cette compréhension des « alphabets » qui interviennent à différentes époques. Marseille est faite de ce pluriel, télescopage permanent. Les objets (à l’image d’un savon ou d’un carreau de faïence) le suggèrent en permanence. De la même façon, elle avait répondu en 2017 à une commande publique de New York sur l’histoire du quartier de « Little Syria », située à l’extrémité sud de Manhattan et qui deviendrait plus tard le World Trade center. Qui se rappelle encore de ces rues peuplées de chrétiens arabophones et maronites , installés à la fin du 19ème siècle ? Aujourd’hui, elle s’intéresse à la circulation des objets entre le Maroc et le Japon.

Des formes anciennes revisitées, des associations de savoir-faire d’ici et d’ailleurs, d’hier et d’aujourd’hui, comme autant de versions d’identités façonnées par le mouvement des hommes. (FRAEME, Marseille)

Depuis 2013, Sara Ouhaddou conduit ainsi un travail sur la broderie, en collaboration avec des tisserandes berbères. Cette association a débouché avec l’une d’entre elles à la réalisation d’une grande pièce « Sans titre », que les deux femmes présentent actuellement à Annemasse (France), centre d’art La Villa du Parc, en collaboration avec le Cube (Rabat). Deux autres artistes marocains, M’Barek Bouhchichi et Abdessamad El Montassir, accompagnent en parallèle ces réflexions sur la production d’objets et de symboles.

Tout comme la céramique ou d’autres formes artisanales, la broderie est un vecteur d’information et de transmission. Les œuvres permettent à la fois de raconter des faits quotidiens, relatifs à la vie des femmes berbères, mais aussi d’intégrer dans cette narration des éléments plus spirituels. Les dieux et les déesses ne sont jamais loin. Les mythes fondateurs alimentent le récit et le font largement déborder de son cadre initial. La plasticienne et l’artisane parlent la même langue, usent des mêmes techniques et leur travail commun s’intègre à une longue histoire, harmonieuse et cohérente.

« Je suis obsédée par ce que j’appelle le lieu juste, c’est à dire un lieu, un moment, un état égal pour chacun mais pas le même pour tous, toujours différent parce que propre à chacun. Par conséquent je suis fascinée par l’idée que quelque part on pourrait tous se comprendre par des systèmes (d’écriture entre autres) qui seraient propres à chacun. C’est comme ça que fonctionnent les signes du tapis berbère, une personne s’exprime en tissant, et toutes les différentes communautés peuvent déchiffrer… »  Sara Ouhaddou, Manifesta 13, Marseille.

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« Quand je n’aurai plus de feuille, j’écrirai sur le blanc de l’œil » est visible jusqu’ au 7 mai 2022 à la Villa du Parc, en collaboration avec Le Cube – independent art room. Annemasse (France).
RC (ZO mag’)
Photos : DR et © Sara Ouhaddou

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Repères :
Sara Ouhaddou est née en 1986, à Draguignan. Elle étudie au sein de l’Ecole Olivier de Serres (Paris) et vit entre la France et Marrakech.

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