Grande Bretagne / peinture / Jadé Fadojutimi / L’ORIGINE SERA POUR PLUS TARD

Dans sa manière de parler, l’évidence du bonheur. La peinture n’est plus la résolution d’une souffrance, un vide sidéral qu’il faut combler. Jadé Fadojutimi éprouve avec sa toile une satisfaction émotionnelle et physique permanente. Il faut voir ses portraits. Jadé est une jeune femme carrément radieuse. En 2021, elle expliquait de cette façon sa soif de peindre : « Pendant que je peins, l’unité harmonieuse de mes sens devient évidente » et de poursuivre un peu plus loin :« La peinture mentionne tout un océan de couleurs et j’étais tellement prêt à y plonger. Instinctivement, je savais que la peinture était la seule option pour moi. » L’interview qu’elle donne alors au magazine « studio international » (avril 2021) relève alors d’un plaisir permanent.

 

Une œuvre interrompt le flux, mais lui trouve en même temps le seul écho possible, la seule résonnance qui s’accorde.

Un an plus tôt, alors qu’elle vient à peine de finir ses études d’art en Grande-Bretagne (2017), l’artiste (25 ans alors) est entrée à la Tate Modern. Rien de moins. Ses grands formats, entre abstraction et figuration, ont littéralement ébahi la critique. Comment les décrire ? D’immenses fluidités qui prolongent le corps de la peintre et mettent en scène des mouvement reconnaissables, dans une immersion de la matière-couleur. Et ça ne semble jamais s’arrêter. Un tableau en appelle un autre. Une œuvre interrompt le flux, mais lui trouve en même temps le seul écho possible, la seule résonnance qui s’accorde. Elle dit être tombée amoureuse de ses bâtons d’huile. Il en résulte des peintures printanières, des cerisiers (abstraits et japonisants) dans une lumière qui rappelle l’impressionnisme et son attachement au Japon. Le tableau s’appelle « Anniversaire : la mort », et on se couche au pied de cet arbre et on ferme les yeux, prêt pour le grand voyage. Bien sûr, ce ne sont pas seulement ces bâtonnets de couleur qui en sont à l’origine, mais une formidable bibliothèque de formes, d’objets, de sentiments qui l’entourent, et qui remplissent son atelier.

Dans sa folie lumineuse à une extrémité de la toile, et le temps, c’est-à-dire le mouvement, à l’autre bout.

La couleur ? Elle se tient dans sa folie lumineuse à une extrémité de la toile, et le temps, c’est-à-dire le mouvement, à l’autre bout. Ensemble, ils jouent des déplacements de masses et de sentiments. L’un recouvre l’autre d’un glacis transparent, d’une fine couleur de glace, comme la lumière tombée d’un vitrail. La toile rassemble. A l’image du lieu dans lequel elle peint. « Il est important que l’espace ressemble à ma chambre, un environnement familier qui a toujours suscité mon envie de créer. Je me gâte avec des informations visuelles et je prends de mon environnement comme s’il s’agissait d’un dictionnaire, d’un thésaurus, d’un atlas et d’une encyclopédie. » Et de cette façon, aucune angoisse, aucun doute ne viennent perturber ces noces. La toile est dressée, traversée d’ondes. « Il n’y a aucune pression pour prédéterminer un travail et la peur s’évapore instantanément lorsque j’entre dans l’espace. »

Vulnérables et émerveillés
« Another Pathetic Fallacy » (que l’on peut traduire par « Une erreur pathétique ») ne concerne en aucune façon les tableaux présentés pour cette première expo muséale. Ils respirent au contraire une harmonie et un bien-être absolus. Ça se passe dans des pièces blanches, devant d’immenses baies vitrées, quelque part sous le soleil des Caraïbes (Miami). Leur lumière irradie de façon sereine. Vulnérables et émerveillés.

« Yet, Another Pathetic Fallacy », ICA Miami, jusqu’au 17 avril 2022.  

« Mes écrits sont des pensées sur papier, des pensées qui se produisent au milieu de la peinture, du dessin ou de l’expérience de quelque chose qui déclenche une prise de conscience de ma pratique. Habituellement, je me retrouve à laisser tomber mon pinceau pour écrire quelque chose, que ce soit une idée ou une concoction de phrases qui me chatouillent. Je les vois comme un réflexe, comme une marque intuitive en réponse à la peinture.  » Jadé Fadojutimi (interview avec David Trigg, avr. 2021) 

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RC (ZO mag’)
Photos: DR et © Jadé Fadojutimi

A lire : Jadé Fadojutimi – interview : « Je baigne dans les conversations entre couleur, texture, ligne, forme, composition, rythme, marques et perturbations » (studiointernational.com)

Repères:
Jadé Fadojutimi est née à Londres, en Angleterre, en 1993. En 2015, elle a obtenu un BA de la Slade School of Fine Art de Londres et deux ans plus tard, une maîtrise du Royal College of Art de Londres.

Expositions personnelles (sélection) :
2021 : Jadé Fadojutimi , Hepworth Wakefield, West Yorkshire, (GB)
     ICA Miami (USA) 
     Pourtant, une autre erreur pathétique , (2021)
2020 : Jesture , Galerie Pippy Houldsworth, Londres (GB).
2019 : Le dynamisme engourdissant des personnages en jeu, PEER UK, Londres.
     Elle bourrasque, Galerie Gisela Capitain, Cologne (Allemagne).
2017 : Héliophobie, Pippy Houldsworth Gallery, Londres.

Expositions collectives (sélection) :
2021 : Biennale de Liverpool
     Mélanger les choses : peindre aujourd’hui, Hayward Gallery, Londres.
     Promenez-vous dans l’art britannique, Tate, Londres.
2020 : Jeux infinis, Capitain Petzel , Berlin (Allemagne).
2018 : Deux X Deux pour le Sida et l’art, Rachofsky Warehouse, Dallas (Texas, USA).
2017 : Sous le voir, The Crypt Gallery, Londres.

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