Cameroun / Peinture / Joël Mpah Dooh / IL LUI ARRIVE DE SE SENTIR SEUL

D’évoquer sa fragilité est une façon très complexe de voir l’humain. Les raisons de celle-ci sont tellement nombreuses. Liées au passé, tributaires de l’origine, du lieu comme du moment, des inquiétudes passagères, de la position du voisin et de son ombre à température variable. Comprendre la fragilité, c’est aborder la multiplicité de ce monde. Joël Mpah Dooh s’y intéresse comme plasticien, mais aussi scénographe, tant au visuel comme dans l’écrit. En 2016, son exposition à la Momo gallery (Joburg), « Since we last met », utilisait ainsi la tôle, et le choix avait une profonde signification. Voilà un matériau résonnant, qui propage le son, dans des effets de distorsions, assez proche en cela de nos sensibilités. Humour ? Certainement, et c’est une qualité de plus à ce travail plasticien, d’entretenir toutes les possibles associations, parce que ce multiple est aussi un vecteur résilient.

Nous consacrons un temps important à rester en lien permanent avec l’autre. Si cette volonté est louable, qu’en est-il dans les faits ? Quelle part d’illusion, cette interconnectivité ne revêt-elle pas ?

Lors de cette exposition en Afrique du sud, il y a une photo très révélatrice des inquiétudes de l’artiste. On le voit devant des fils sectionnés, qui pendouillent, un peu à l’image de ces câbles, sur des chantiers de démolition, qui tombent du plafond, privés de toute connexion. Sur ce sujet, Joël Mpah Dooh réfléchit abondement. Notre époque est celle de l’interconnexion. Nous consacrons un temps important à rester en lien permanent avec l’autre. Si cette volonté est louable, qu’en est-il dans les faits ? Quelle part d’illusion, cette interconnectivité ne revêt-elle pas ? Comment va-t-elle évoluer dans le temps et de quelle réalité se nourrira-t-elle ? « Since we last met » inscrit ainsi des postulats assez inquiétants. Joël Mpah Dooh s’intéresse à la fragilité, il ne construit pas des illusions de prospérité et d’innocence, mais il reste… souriant.

C’est une scène nocturne, une situation de la rue et de la solitude, c’est tout simplement notre vie.

Evoquer la fragilité humaine revient à ouvrir des portes de tous les côtés et voir s’engouffrer le vent, le tourment, les éclairs aussi et peut-être des avions chargés de bombes à fragmentation identitaire. Dans une peinture forcément inquiète, Joël Mpah Dooh s’interroge sur cette nature, bancale et rafistolée, qui nous accompagne et nous sert d’identité. Il mesure toute l’importance du groupe, mais il s’interroge sur la qualité du ciment. Du réalisme que lui renvoit en permanence cette image dont il parle dans ses toiles et ses performances, un homme seul, avec une valise, en partance pour quelque part. le lieu est vide, il n’est sûr qu’il sache vraiment quel est sa destination.

« La liberté de créer son propre espace de survie, c’est vraiment intéressant pour moi. L’État est dans une sorte de chaos, mais il y a des gens intelligents qui créent ce que j’appellerais, personnellement, l’île de la pensée, l’île de la résistance. Ce qui est intéressant, c’est de se réveiller le matin et d’aller sur son île de résistance. Vous pouvez expérimenter la vérité et la beauté de la vie parce que vous êtes dans votre propre île de résistance. » Joël Mpah Dooh

,

Roger Calmé (ZO mag’)
Photos: DR et ©Joël Mpah Dooh

Repères:
Joël Mpah Dooh est né en 1956
Il est diplômé des Beaux-Arts d’Amiens (France). Vit et travaille à Douala (Cameroun)

Sélection d’expositions individuelles et foires :
2019: Dubaï art fair, art fair, Galerie Mam, Dubai (U.E.A).
           Ganaa Gallery, group show, Ganaa Gallery, Seoul (Corée du sud)
           Investec Cape Town, art fair, Momo Gallery, Capetown (Afrique du sud).
2016: Trois, solo exhibition, Galerie Mam, Douala (Cameroun).
           Since we last met, solo exhibition, Momo Gallery, Johannesburg (Afrique du sud).
           Time to meet, solo exhibition, Omenka Gallery, Lagos (Nigeria).
2014: Crossing (an african arabian dialogue) , with Raouf Rifai, Mojo Gallery, Dubai (U.E.A).
2012: Let’s take a walk , solo exhibition, Momo Gallery, Johannesburg (Afrique du sud).
           Joburg Art Fair , art fair, Momo Gallery, Johannesburg (South Africa).
2009: Open studio, solo exhibition, Galerie Mam, Douala.
           Open studio, solo exhibition, Fondation Donwahi, Abidjan (Côte d’Ivoire).
           Wonderful experience, solo exhibition, Artist proof studio, Johannesburg.
2008: After taste, solo exhibition, Afronova Gallery, Johannesburg.
           Joburg scene, thee-man show, Bag Factory, Johannesburg.
           As you like it, group show, Johannesburg Art Fair, Sandton Convention Center, Johannesburg.

Laisser un commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Site Web créé avec WordPress.com.

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :