Dans quel espace, un peintre habite-t-il ? Est-ce l’atelier ou bien la toile ? Possède-t-il une maison et un accès au ciel ? Son espace le plus intime, où se trouve-t-il ? Imaginaire ou bien réel ? Abdelkader Larraj peint quelque chose d’immense, une lumière qui n’a pas de commune mesure avec notre monde. Ce dernier répond à un cloisonnement que le peintre marocain ignore. Rien d’étonnant donc que le titre de cette exposition de Casablanca (So Art Gallery) reprenne l’idée du lieu. « Espaces habités ». Celui-ci est construit, avec un soin immense et paisible. Il va entre les galaxies les plus lointaines, baigné par la lumière du matin. C’est un monde comme Mondrian en avait eu la soudaine idée, face à la complexité d’un feuillage. Le contrejour est bien trop insensé pour le copier. Donnons de cette merveille une rime visuelle, juste deux mots, à angle droit, qui partage le ciel par le vol d’un oiseau.

Abdelkader Laaraj écrit à ce sujet un très beau texte où il épingle le désir profond du peintre, sa maison-lumière. « Il projette son désir de grands espaces dans sa peinture. Les petits personnages exaucent son vœu de nager dans l’immense. Gageons que le jour où il réalisera son rêve de disposer d’un atelier pour réaliser de grands format, Abdelkader Laâraj peindra… » l’immense à la même échelle, sans avoir à se soucier de la dimension physique. Libérés de toute contrainte, de quelle taille seront ces humains qu’il réduit à des points, des virgules, des synthèses ? Immenses, comme le sont les rêves d’enfants, dans lesquels le corps s’étire à l’infini.

Il y a quelque chose de jubilatoire dans ce dessin, par son innocence, et sa couleur plus encore. Les peintres africains travaillent souvent dans cette possible liberté. La terre est dure, d’une aridité monochrome, le rêve est à l’inverse, léger comme un mobile de Calder ou un masque du Rift, ornés de fleurs, d’exubérance, beau comme une danse. Abdelkader Laaraj peint de cette façon et sa maison est construite selon les mêmes lois. Ne croyez surtout pas qu’il s’agisse de rigueur géométrique. Passent dans ce ciel tendu de lignes, des humains redevenus oiseaux, aux temps les plus anciens qu’aucune mémoire n’écrit. Ils se rendent à une fête, ils descendent du ciel, ou de la montagne, ce n’est pas le mot qui importe, mais la lumière.
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« Espaces Habités », Abdelkader Laaraj, du 10 mars au 11 avril, So Art Gallery, Casablanca (Maroc).
RC (ZO mag’)
Photos: DR, by courtesy So Art gallery.
catalogue-abdelkader-laaraj-espaces-habit-s.pdf (soart-gallery.com)
Repères :
Né en 1950 à Casablanca, Abdelkader Laâraj est peintre et sculpteur.
Il vit et travaille à Casablanca.
1993 – 2006 Expositions au Maroc (Casablanca, Rabat, Marrakech, Tanger …) et également à l’international, notamment en France, Italie, Canada, USA, Bahrein, sultanat d’Oman, Emirats…
1988 : 1er prix du concours international de sculpture sur glace, avec l’artiste Mohamed Chebaa à Chicago.
Ah! Ce Calmé! Qui offre aux peintres… et à ses lecteurs un merveilleux espace dans le ciel!
Il fait planer!
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merci à toi Eve, sauf que… c’est bien difficile, le monde. Tu es au courant ?
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