C’est une folie complète que d’imaginer un peintre (ou tout autre personne posée à la surface de ce monde) dans un fonctionnement singulier. Nous sommes tout le contraire de ça. Pluriels, multiples, combinés de toutes les manières, notre langage, nos déplacements, nos pensées sont à cette image. Ils s’agitent beaucoup de choses à l’intérieur comme à la périphérie. Et ce grouillement est de loin le meilleur qui puisse nous arriver.

Il y a quelques semaines, Option Dzikamai Nyahunzvi présentait pour la première fois son travail à Londres. La galerie Unit London accrochait ses plus récentes réalisations, qui s’inscrivent justement dans cette recherche des origines. Le jeune peintre du Zimbabwe investit une grande énergie à tenter de comprendre comment le monde restitue plus ou moins consciemment cette diversité assez folle des fluides. L’expo qui s’intitulait précisément « Kwatinobva Kunoyera » (Origines sacrées) peut-elle apporter un éclairage sur notre hybridité grandissante ? En tout cas, la peinture de Nyahunzvi le traduit de plus en plus clairement.
…Dans l’invitation aux totems, à la fréquentation sereine des esprits, à des associations lumineuses des mots, des sons et de la couleur finalement, qui retrouve l’apaisement.
Le jeune peintre du Zimbabwe ne cache pas que sa propre existence est à l’image de ce chaos, et que la peinture lui permet d’apaiser en partie ces bouleversements internes. Il y a une part existentielle profonde, mais elle n’explique pas à elle seule son engagement philosophique. La société dans laquelle il vit est également à cette image. L’histoire n’a cessé d’ébranler ses fondations. Le rapport initial à l’origine enregistre de profondes secousses. Comme les plaques tectoniques qui dessinent la surface de ce monde, plusieurs continents (de la pensée) se superposent les uns aux autres. La peinture de Nyahunzvi en a pleinement conscience. Et c’est certainement un grand bien, un formidable apaisement dont ses toiles font aujourd’hui écho.


Cette fois, le peintre ne se contente pas de subir cette dualité de la personnalité. Il va tâcher d’en comprendre le pourquoi (historique et culturel) et par la même occasion de renouer avec les équilibres premiers. Dans cette hybridation culturelle qui écartèle toute une société, pour partie chrétienne et de l’autre profondément animiste, il convient de retrouver les articulations de la pensée. Ses toiles le font à leur manière, dans l’invitation aux totems, à la fréquentation sereine des esprits, à des associations lumineuses des mots, des sons et de la couleur finalement, qui retrouve l’apaisement. Elles ont cessé d’être venimeuses. Un flux nourricier alimente la chromie. C’est le cas de Mbudzi Yemunhu (huile, acrylique et collage, 0, 86 x 0, 81), où l’homme zoomorphe réconcilie ses appartenances. Il est humain et chèvre, il est avec l’acceptation du totem une forme tranquille, dans le petit matin lumineux.
« Un totem, comme un signe astrologique, mais beaucoup plus spirituel qui traduit le tempérament, l’attitude et la personnalité (…) Chaque origine est sacrée à sa manière ». Option Dzikamai Nyahunzvi
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RC (ZO mag’)
Photos : DR and by courtesy Unit London gallery.
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