Débarrasser de toute couleur. Ne conserver que des blocs noirs, des cubes signifiants. Après s’être penché sur la guerre et les victimes tombées au front, Felix Shumba met un éclairage sombre sur ceux qui manipulent. Les guerres, les révolutions, les alliances intercontinentales se font dans des coulisses. Nous n’en voyons rien, que la parade feutrée, le spectacle mis en scène. Le type est sur une estrade, ou un command car, il rend un hommage au compagnon qu’il vient d’assassiner. Il en est ainsi partout, en Afrique du sud, au Zimbabwe, dans les couloirs de la République. C’est ici le motif de ce second travail, trempé dans la même encre. Noire.

Il explique : « Je suis préoccupé par la façon dont les matrices de pouvoir et de violence façonnent continuellement les réalités et les expériences des Noirs dans l’Afrique postcoloniale et ses diasporas. Bien que le temps ait passé et que les déclarations d’indépendance aient été ratifiées par les institutions mondiales, la vie des Noirs ordinaires a empiré. » Sur ces dessins sombres, concentrés à l’extrême, c’est cette domination qu’il épingle. « La violence est identique, la discrimination structurelle, la brutalité étatique et la pauvreté ne font qu’empirer. » Un type monte à la tribune, il vient prononcer quelques mots et en appelle à la soumission citoyenne.


Dans son précédent travail, le dessinateur remontait du fond des tranchées ces corps anonymes, suppliciés de l’histoire, sans visage autre que celui d’un masque. Cette fois, la masse n’apparaît pas, mais la réalité continue d’être masquée. Par le discours lénifiant, par l’évacuation d’une victime. Des bras emportent cette pauvre chair. Le président parle d’un sacrifice nécessaire. « Les rêves libérateurs d’hier ne restent rien d’autre que des rêves d’aujourd’hui. »
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RC (ZO mag’)
Photos: DR et Shumba Felix
Contact : (20+) Shumba Felix | Facebook
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