Dans des chambres dépourvues d’ouverture, les enfants se racontent des histoires qui écartent la pression des murs. La narration comble les vides et les serpents retournent à des choix de papier, immobiles, inoffensifs. Il se peut que Tiffanie Delune ait été cette enfant. Le récit lui a permis de recouvrir la lumière et une liberté longtemps interdite. Et de nouveau, au cœur de cette forêt immense, les personnages reprennent vie dans une danse païenne et innocente. L’énergie est revenue et il est possible que la joie aussi.


Les critiques sont souvent gênés au moment d’évoquer son travail. Ils s’arrêtent le plus souvent à ses origines, évoquent des instants difficiles et soulignent son goût pour le design qu’elle maîtrise remarquablement. Mais plus que ce savoir-faire, il faudrait s’arrêter aux symboles qu’elle invite. La liberté et l’énergie sont au centre de son dictionnaire des formes. Les découpes claires concentrent encore ce flux et autorisent les mouvements les plus étonnants. Dans une œuvre de Tiffanie Delune, le vol, la plongée cosmique, la natation aérienne sont récurrents. À l’image d’un tarot réinventé, la Reine danse les pieds dans les étoiles et le Cavalier perche en haut d’un arbre, entourés d’oiseaux-poissons. Liberté permanente du sens, de la couleur, de la superposition des matières aussi. Elle le dit elle-même, « vouloir oublier toute inhibition, dans le choix des matériaux s’autoriser tous les rêves, toute l’énergie et le possible.. »
« Naviguant entre mon moi fantôme et des formes pleines de lumière, de mouvement et d’énergie, » Tiffanie Delune
Il est inutile d’aller chercher les raisons de ce ballet fantasque. Existentielles ? Ce n’est pas si important. La toile est un jeu de cartes dont elle lit les messages. Ces figures vives, incisives comme le sont les sentences des cartomancies, lui indiquent des chemins possibles. La porte s’ouvre et la mer (ou la forêt, ou le ciel de couleur variable) se glisse dans l’intervalle.

Dans le catalogue d’une récente exposition à Londres (« Seeds Of Light », Ed Cross Fine Art), elle dit être dans cet « entre », par la conjugaison des moments, dans une possibilité de construction. « Naviguant entre mon moi fantôme et des formes pleines de lumière, de mouvement et d’énergie, » elle irait ainsi d’un rivage à l’autre. La mer n’en est pas vraiment une, pas plus que la forêt est purement végétale. Tous ces mondes passent par des éclaircies, des changements brutaux de signification. Oublier toute inhibition et raconter la naissance de soi, de ce rêve dont on fera une vie. La seule possibilité. L’unique issue qui nous soit autorisée. Ce sont les cartes qui le disent !
RC (ZO mag’)
Photos: AKAA 2021 et Tiffanie Delune
Contact: Représenté par Ed Cross Fine Art (Londres, Royaume-Uni).
Tél. +44 (0) 750 706 75 67

Repères:
Tiffanie Delune est née en 1988 à Paris (France). Elle vit et travaille à Lisbonne (Portugal).
Expositions personnelles
2020: Seeds Of Light, organisé par Katherine Finerty, The Gramophone Works With Ed Cross Fine Art, Londres (GB).
2019: Metamorphosis, Someth1ng Gallery, Londres.
2018: Coloriosity, 16/16, Lagos (Nigéria).
Expositions collectives
2021: Her Dark Materials, Organisé par Philly Adams, en ligne avec Eye Of The Huntress, (GB)
In the Beginning (en ligne) avec Ed Cross Fine Art, Londres (GB).
Shape of the New (en ligne) avec ArtCan, Londres.
In The Amid Of All That Is, Band Of Vices, Los Angeles (USA)
Collections:
Fondation Gandur Pour L’Art, Genève (Suisse).
New York-Presbyterian Alexandra Cohen Hospital For Women And Newborns, New York (USA).
Laisser un commentaire