Ils ont construit un mur pendant la nuit. C’est ainsi. Le matin, nous nous réveillons et désormais nous ne pourrons plus aller de l’autre côté. Ils ont bâti un grillage, ils ont rempli une mer féroce. Et le rivage nous est inaccessible.
Depuis plusieurs toiles, Daouda Traoré cogne son front contre cette matière obtuse qui est le refus. Les constructions de ce type sont pour ainsi dire « climatiques ». Elles germent de partout. Les Américains ont la leur, les Palestiniens en subissent une aussi. Et Berlin en son temps… Du béton électrifié, gardé par des chiens et des mitrailleuses lourdes. Défense d’entrée ! C’est écrit en plein milieu des regards. Quant à l’Afrique, c’est une mer pleine de dangers, une mer bleue et assassine.
Alors Daouda a peint ces gosses qui passent par-dessus. Ils se hissent au grillage et ils l’enjambent. Parce qu’ils n’ont que ça comme solution. La toile est tout entière dans ce mouvement de la liberté. Et c’est presque joyeux de voir ça. Cette capacité de franchir la bêtise de l’obstacle : « C’est un hommage à un ami qui a fait cette route et qui aujourd’hui se trouve de l’autre côté de l’eau. Un chemin qui est celui de la dignité et de la quête d’un bonheur, » écrit-il dans une lettre.
Il n’y a rien d’autre à dire. Parce que la toile est toute entière dans ce refus. Parce que l’histoire ne fait que le répéter et chaque fois, c’est d’une parfaite incohérence. Les murs ne servent à rien. Ils sont des murailles de sable. Le vent finit par les emporter. Des peintures parfois les recouvrent. Avec patience, des hommes creusent des tunnels. Et la lumière revient sur la toile. Daouda Traoré est un peintre réaliste, en ce sens qu’il connaît le sens de l’histoire, qu’il en est le témoin et le traducteur.
« Tama », peinture, collage et tissage, 0, 40 x 0, 40m (2021);
RC (ZO mag’)
Photo: D. Traoré
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Tél.: 00 223 783 46 400
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