Le plus souvent, il s’agit d’un navire de commerce ordinaire. Les deux tiers du temps, il charge des cargaisons ordinaires et le restant de la marchandise « meuble », c’est-à-dire des hommes et des femmes, pour lesquels aucune modification n’a besoin d’être apportée. Le coût d’une embarcation neuve est de 50 000 livres.Mais on peut en acquérir d’occasion pour 20 000. Les navires sont de tous les genres (brick, goëlette, caraque, pinasse…) et peuvent emporter de 20 à 700 humains.

Durant les quatre siècles qu’ont duré la traite négrière, le chiffre le plus bas fait état de 11 millions 700 000 personnes qui sont convoyés entre l’Afrique et l’Amérique. A celà, il faut ajouter encore les 17 millions de la traite orientale (arabe) et le nombre plus incertain lié à l’esclavage intra-africain.
L’installation de Grada Kilomba, installée le long du Tage (Lisbonne), dispose donc 140 billes de bois, lesquels reproduisent fidèlement le fond d’une cale de 32 mètres et sa « marchandise meuble » durant la traversée. Cent quarante poutres humaines, brulées, qui disent l’arrachement et les mots de la longue douleur. Dans l’imaginaire occidental, le navire est synonyme de liberté, ses voiles ouvrent le monde.

Durant ces deux mois d’exposition, Grada Kilomba nourrit le lieu de trois performances qui rétablissent la voix et le geste. Rétablir les mots, que personne n’a pu noter, les paroles de la blessure, vocables emportés, gestes dissous et effacés. La dernière aura lieu le 17 octobre, sur le pavé, face au Tage, comme à Bordeaux ou Nantes, le long de ces quais ouverts à l’océan.
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O Barco/The boat, jusqu’au 17 octobre 2021. Musée des art, architecture et technologie, Lisbonne (Portugal).
RC (ZO mag’)
Photos: DR et Grada Kilomba
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