Mozambique / peinture / Ernesto Shikhani DEMAIN NOUS MARCHERONS

Parce que la construction de la peinture ressemble parfois à celle d’un pays. Les notions de libération et de mémoire y tiennent une place importante. Les couleurs aussi. Ce fut le cas le cas d’Ernesto Shikhani, dans cette lutte menée à l’indépendance. Se libérer des images anciennes pour les réinventer, les remettre dans sa propre couleur, celle du peintre et de son pays, le Mozambique.

Nous sommes dans les années qui précèdent la fin de la colonisation (1975). Dix ans de conflit armé entre la guérilla (Frelimo) et le Portugal, au cours desquelles Skikhani engage sa peinture. Le tableau exposé à l’Akaa, Untitled (Liberation War series), date de cette époque. Et il a une véritable histoire. Ces moments ensanglantent la toile, la déchirent et émettent des explosions répétées. Des gouffres sont ouverts, des ciels se referment. Dans cette tourmente, le peintre témoigne de son courage et sa palette participe activement à la dénonciation.

En 1974, la dictature tient le Portugal. La police politique n’apprécie pas le travail du peintre. Il est jugé subversif. Les menaces d’emprisonnement se précisent et Shikhani est forcé de quitter le pays… en laissant son travail derrière lui. « Untitled (Liberation War series) » fait partie de ce lot. Il a fallu attendre 2005 pour voir ces toiles réapparaissent.

Ces moments ensanglantent la toile, la déchirent et émettent des explosions répétées. Des gouffres sont ouverts, des ciels se referment.

Cette fois encore, c’est une galerie qui a fait ce travail de la mémoire. Perve ne va pas se contenter de sortir les tableaux de l’obscurité : elle rallume aussi la lumière. À la mort de Shikhani (2010), elle continue à montrer ce travail avec conviction. Ce sera notamment le cas en 2018, pour la première fois à l’Akaa où le peintre lusophone rencontre un vrai succès. Ensuite à Madrid (Just Mad X), Dubaï (Art Dubai), aux États-Unis (1-54 NY), et au Portugal (Just LX). La conviction est le mot le plus approprié, à l’image de cette phrase de Carlos Cabral Nunes, fondateur :  » une recherche constante de nouvelles voies dans son propre voyage, en tant qu’artiste et en tant qu’homme soucieux des enjeux qui se posent aux sociétés africaines contemporaines. »

Untitled (Liberation War series) 1973

La peinture de Shikhani est celle du courage et de la dignité. Ce sont des mots qui ont un sens, qui sont intemporels, et dont on ferait bien de se rappeler aujourd’hui dans ces grincements répétés de l’horrible machine.

,
Untitled (Liberation War series) 1973, technique mixte sur papier, 50 x 32 cm.
© Perve Galeria.
Visible à l’Akaa 2021 (nov prochain)
Roger Calmé (ZO mag’)
Photos: by courtesy Perve Galeria.
http://www.pervegaleria.eu

Laisser un commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Site Web créé avec WordPress.com.

Retour en haut ↑

%d blogueurs aiment cette page :