Afrique du sud / Exposition / MASHŪRAH ARTS / NOUS HABITONS LE MEME QUARTIER

Il y a deux ou trois ans, alors que son nom commence à être connu au-dehors de l’Afrique du sud, Gulshan Khan a vu certaines de ses images intégrer les collections du Musée sud-africain d’Iziko. Elles feraient désormais partie des archives nationales. Gulshan est photographe et elle a été la première femme africaine à intégrer l’AFP (2017). Le regard qu’elle porte sur la réalité sud-africaine est profondément social. Elle a notamment travaillé sur la problématique de l’eau, la santé, les déchets plastiques… Sujets épidermiques. Elle dit alors avoir éprouvé une grande fierté à cette décision du musée… mais pas seulement.

Cette réalité minoritaire, sous-représentée, invisible ou quasiment.

En 2017, Gushan Khan a également lancé une enquête visuelle sur la communauté musulmane en Afique du sud.  » The Things We Carry With Us » illustre remarquablement cette réalité minoritaire, sous-représentée, invisible ou quasiment. Les images ont fait le tour du monde. Times les a retenues parmi les cent plus importantes de 2018. Bref,  Gulshan Khan , jeune photographe musulmane et sud-africaine, est devenue visible. Et cette même année, le musée d’Iziko l’intégrait à ses archives.

« Une réponse, dit-elle, au manque de représentation, mais aussi à la fausse représentation et à l’incompréhension des récits musulmans.«  Sara Bint Moneer Khan

« Lorsque nous avons grandi en tant que musulmans en Afrique du Sud, nous ne voyions pas des gens comme nous dans nos livres d’histoire, nous apprenions l’histoire néerlandaise, britannique et coloniale. C’était le premier travail documentaire contemporain sur l’islam à être intégré à nos archives nationales, » explique-t-elle alors dans un documentaire. Et d’ajouter que l’histoire collective rétablit une petite partie de cette mémoire communautaire qui ne dispose en Afrique du sud d’aucune lumière. La salle est obscure, on n’y voit rien.

Sur la base du même constat, Sara Bint Moneer Khan, conservatrice et chercheuse londonienne, a créé Mashürah Arts. Sa thèse de doctorat portait sur « l’alphabétisation visuelle » et la défense de l’art dans la communauté musulmane lui a semblé une priorité identitaire, autant que sociale. « Il s’agit d’une réponse, dit-elle, au manque de représentation, mais aussi à la fausse représentation et à l’incompréhension des récits musulmans. »

Par ignorance (et pas seulement), une tendance croissante  cherche à associer l’art d’origine musulmane et la seule religion. En regroupant aujourd’hui vingt artistes d’horizons artistiques différents, l’intention est donc de présenter ce pluriel du regard. Dans un espace commun, le dialogue va se nouer. A l’image des questions que peuvent se poser les visiteurs, décliner des mots, des pensées, un engagement, une spiritualité… et amorcer la conversation. D’ailleurs « Mashürah », traduit de l’arabe signifie « consultation » ou  « demander conseil ». 

C’est d’une réunion dont il est question. Réunir, affirmer, demander, rendre hommage et enterrer le silence.

Mashürah Arts montre de façon très claire les interrogations que les créateurs se posent. L’abstraction, l’absence du visage sont notamment « représentées », mais aussi le rapport à l’écrit, et pas seulement l’écrit religieux. Hanna Noor Mohamed propose ainsi une « Sonde postcoloniale » , 2021, au tableau noir, qui s’interroge sur la violence, le terrorisme, les sujets inspirés par la diaspora. Sociétale, comme le sont les images de Gushan Khan et cette jeune fille sur son cheval de bois, dans la lumière de la nuit, qui chevauche, bride abattue. La plus belle image qui soit, multiculturelle, festive, croyante en l’humanité. A regarder tous les matins!

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MASHŪRAH ARTS, du 24 juillet au 30 septembre 2021. Studios Greatmore, Le Cap (Afrique du Sud). Shukry Adams, Mishkhaah Amien, Kamyar Bineshtarigh, Sahlah Davids, Rushda Deaney, Hasan et Husain Essop, Haroon Gunn-Salie, Faheem Rhoda Jackson, Laylaa Jacobs, Mahmudah Jaffer, Atiyyah Khan, Gulshan Khan, Hanna Noelah Khan, Shameelah Khan, Nyambo Masa Mara, Nabeeha Mohamed, Rahimah Ismail Rajiwate, Abdus SSalaam Achmat Soni. Roger Calmé (ZO mag’)Photo: © Gulshan Khan

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