Plutôt que le bruit et le désordre, dans ce vacarme de l’entassement, on devrait écouter la lumière. Elle accorde pleinement les choses, elle raisonne et résonne de façon convaincante aux histoires qui font la vie. Abdoulaye Konaté a choisi depuis longtemps ce scintillement. La lumière n’est jamais plus exacte que dans la fragmentation. Le plasticien l’utilise de cette manière, par la juxtaposition des clartés et dans les couleurs qui racontent. Le récit d’une terre, d’un peuple, de ses déplacements, des hommes et des femmes qui en font le tissage et la mémoire.

« Les plis de l’âme » parlent très précisément de ça. Il s’agit de sa deuxième exposition à la galerie 38 et d’un ensemble de 11 oeuvres, monumentales et inédites. Elles se composent de lamelles de tissu, fines bandes plates de coton teint, qui se déroulent comme des vagues de couleurs et de clarté. De la même manière que la lumière passe au travers de l’arbre et donne à lire le feuillage, Abdoulaye Konaté utilise la couleur, à l’image d’un rayon solaire qui illumine une histoire. Parce que chacune de ces pièces illustre des épisodes d’humanité, liés à l’histoire, à la croyance, à l’actualité qui est souvent une illustration pleine de sens.
Bleu nourricier, immersion de l’esprit qui bascule. Vert dans ses multiples variations en hommage à la femme, terres gorgées de rouges
Dans son texte introductif, Simon Njami parle d’un homme qui a choisi le silence, économe de ses mots, en quête perpétuelle du sens. « Dans le monde toxique du bruit et de la fureur qu’est l’art contemporain, l’artiste a toujours pris soin de ne pas trop élever la voix. Il semble que la raison appartienne à ceux qui comprennent et essaient de déchiffrer un sens. » Et la couleur fonctionne comme un révélateur.

Dans les « replis de cette âme », Abdoulaye s’attarde au bleu, couleur fondamentale qui est celle de l’eau et du ciel, et qui nourrit la culture touarègue. Bleu nourricier, immersion de l’esprit qui bascule. Vert dans ses multiples variations en hommage à la femme, terres gorgées de rouges (montagnes sublimes de l’Atlas), de bruns tannés (savanes brûlées, poussières soulevées par le vent), tracés de blancs, d’orangés et de noir, tentures de mariages, couvertures des khaïmas, selles des chameaux, triangles, cercles protecteurs… et puis comme le dit Njami, sur ce gris bleu touareg, toutes ces touches qui sont « la symphonie polychrome du papillon« .
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Les plis de l’âme, 18 juin au 29 juillet, 38 Contemporary Casablanca (Maroc).
RC (ZO mag’)
Photos: DR et by courtesy Galerie 38.
http://www.lagalerie38.com/blog/artistes/abdoulaye-konate/