Un réconfort total, pour les yeux et le coeur, que de regarder cette fresque peinte par Mohamed Debdoubi, dans le cadre du festival d’Asilah. La ville marocaine est un formidable lieu de rencontre. On y joue de la musique africaine et andalouse, on y lit des romans, on y parle aussi de notre humanité, fragile, instable et soumise à la réclusion. C’est dire si cette peinture murale tombe merveilleusement. Il n’a pas encore quarante ans, et Mohamed Debdoubi possède déjà cette clairvoyance plastique qui permet d’ordonner le sentiment et de le rendre lumineux. « Je ne peins pas ce que je vois, dit-il, mais ce que je pense. » Et comme Willem de Kooning qu’il cite souvent, ou Joan Mitchell, Mohamed pense à la lumière, vertu méditerranéenne à laquelle il s’attarde, comme à un principe moral.

Né en 1983 à Tanger, sa palette a commencé par la musique. C’est une formidable école que le solfège, mais baignée d’une telle discipline, qu’il cherche assez tôt, le moyen d’ouvrir les fenêtres. Les rares critiques qui lui sont consacrées parlent d’un tempérament fougueux, de la conscience aigüe de la justice, du besoin de voir et de voir encore.
Sentiment de l’existence, jour après jour, de la confrontation aux « éléments ». Le ciel, le mur, la porte ouverte et refermée.
Quelques toiles permettent de bien saisir ce que la rue lui donne alors de liberté. Un mur blanc, un aplat de bleu solaire, et sur ces verticales, la tentative d’écriture, la trace que le crayon ou l’aérosol dépose. Des mouvements, des regards, des ombres poussées par le vent. A l’image de cette photo noir et blanc qu’il poste sur son réseau social. Un bord de mer, une maçonnerie qui pourrait être une guérite, et de l’autre côté, sans doute un réservoir, posé sur une palette, et qui ressemble aussi à une sorte d’ouvrage défensif. Si l’on observe avec attention, à l’horizon, on discerne les côtes d’Andalousie. Lointaine Europe.


La peinture et l’imaginaire de Mohamed Debdoubi respirent cette nécessité de l’espace. Abstraction figurative, certes, mais dans un sentiment de l’existence, jour après jour, de la confrontation aux « éléments ». Le ciel, le mur, la porte ouverte et refermée. Le souvenir nourricier d’une couleur bleue. Et le vent qui nous pousse.
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RC (ZO mag’)
Photos: DR et Mohamed Debdoubi
https://www.facebook.com/mohamed.debdoubi.526