C’est une chose presque impossible à décrire, parce que personne n’en revient. Tout juste peut-on imaginer et encore… Disons que l’horreur ressemble à ça, et qu’elle ne s’arrête jamais. Son cri continue de percer la nuit. Monstrueux et inaudible, mais qui vous terrasse d’effroi.
Quand il présente en 2019, à la Galerie nationale d’Harare, « Ndirikupinda Nemo », Gideon Gomo fait pénétrer à l’intérieur de notre imaginaire une sorte de limite que l’on doit regarder avec attention. Cette monstruosité est en nous, et nous la nourrissons, comme une mère nourrit son enfant.

« Ndirikupinda Nemo » parle de l’homme dans l’exercice de sa cruauté. L’artiste ne donne aucun nom, aucun repère de temps, mais il sait avec une grande précision que les pointes d’acier s’enfoncent à l’intérieur du crâne de pierre et que la pierre hurle des nuits entières et qu’elle supplie la mort de lui fermer les yeux. Guideon est sculpteur et il connait la tradition de la pierre Shona. Les sculpteurs du Zimbabwe ont une maîtrise importante de cette roche tendre, d’une beauté absolue, profonde et vibrante. Parfois, on entend à l’intérieur battre le coeur d’un oiseau.
Guideon a donc pris la pierre et dans un immense respect de celle-ci, il montre une dernière fois ce que nous faisons subir à la vie. Des pointes d’acier d’acier s’enfoncent au travers de la ferraille. Et la bouche dit dans une supplication l’ultime cantique, au-delà duquel il n’existe plus aucune humanité.

« Ndirikupinda Nemo », Gideon Gomo, National Gallery of Zimbabwe.
RC (ZO mag’)
Photo: DR, exposition « Nhanga Nyaya ». Curated by Raphael Chikukwa, National Gallery of Zimbabwe.
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