Ces trente dernières années, Angèle Etoundi Essamba a photographié la femme africaine. Le singulier est trompeur, donc elle l’a représentée dans beaucoup d’états. Par cette abondance de portraits, il revient une conviction. C’est inscrit dans son regard et dans sa posture, dans la beauté esthétique de ses gestes, et la permanence. Sans tomber dans le cliché quasi iconique, ces séries ont une valeur de reconnaissance. Et c’est certainement ce message qu’elle communique à celles qui regardent ces clichés. « Reconnaissez-vous en elles. Nous sommes cette force et cette histoire.«
Depuis son départ du Cameroun (1972), puis ses études en Hollande (photographie), ses influences ont donc été plurielles. La photographie européenne et américaine l’a certainement influencée. Mais au-delà de ce rapport à la fois technique et esthétique, son souci premier est la représentation la plus attentive, au-delà du stéréotype. On pourrait presque parler d’un documentaire du sentiment, de l’histoire, de l’héritage et de cette résilience à la dissolution. Les femmes d’Angèle Etoundi Essamba ont un chemin à faire, et rien ne peut les en détourner.


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Trente années d’observation pour aboutir à ces dernières séries, de plus en plus anthropologiques, qui éclairent des instants précis du quotidien, de la vie sociale, du travail, du déplacement. Si le rapport esthétique reste fort, si la couleur a permis d’inclure des émotions différentes, au fil des années, la photographe camerounaise s’attarde de plus en plus à des récits circonstanciés. Les séries s’appellent « Invisibles » (2015) ou « Femmes de l’eau » (2013). Elles évoquent la vie quotidienne dans la construction, l’agriculture, la pêche des huîtres, le transport des marchandises.
Lorsqu’on lui pose la question de son appartenance, la réponse est beaucoup plus nuancée que les images le laisseraient supposer. Une forte attache à la représentation africaine, certainement, mais sous un éclairage qui est d’abord une attention à la femme. A la fois celle qu’elle figure dans ses images, et celle qu’elle est dans sa vie. « On est photographe, on est artiste et ensuite seulement on est africain ». Et de préciser que l’Afrique n’est pas une obligation de représentation, que l’œil ne se limite pas à cette seule appartenance, et que c’est avant tout d’humanité qu’il est question. Cette humanité, elle l’évoque au travers de cette femme africaine, qu’elle observe avec admiration et tendresse.
« …ces œuvres rompent avec les stéréotypes qui confinent la femme noire dans certains rôles et sont définis par la pauvreté, la famine, la passivité, la soumission et l’exotisme. Au lieu de cela, ils remettent en question ces clichés en faisant preuve de dignité, de fierté et de force.« Angèle Etoundi Essamba (acquisition de trois photos par le Museum of Modern Art (MoMA) de New York)
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(*) Femme qui porte l’univers (1993)
Roger Calmé (ZO mag’)
Photos: Angèle Etoundi Essamba
https://www.galeriecarolekvasnevski.com/ang%C3%A8le-etoundi-essamba#Biographieangele
A lire: https://awarewomenartists.com/artiste/angele-etoundi-essamba/
Texte d’Eva Barois De Caevel (Archives of women artists)
Et Angèle Etoundi Essamba : voiles et dévoilements. Pierre Jaccaud, Apt, Fondation Jean-Paul Blachère, 2008.
Repères
Dernières expositions:
2020: Galerie 23 Amsterdam (NL)
2018: MB Hotel Ganvié (Bénin)
Fondation Claudine TALON Cotonou (Bénin)
Museum Fünf Kontinente Munich (DL)
Fondation Claudine Talon Cotonou (Bénin)
2017: Musée de l’Eau Pont en Royans (France)
ACP Culture Brussels
Galerie Didier CLAES Brussels
2016: Musée Théodore Monod Dakar (Sénégal)
2015: AUC-ECA – Conference Center Addis-Ababa (Ethiopie)
Pavillon de l’Eau Paris (France)
African Union Addis-Ababa (Ethiopie)
2014: Agence Française de Développement (AFD) Paris (France)
Orangerie du Sénat Paris (France)
Institut Français Cotonou (Bénin)…
Le travail d’A. Etoundi Essamba a été montré dans nombre d’institutions, de biennales (Venise, La Havane, Dakar, Johannesburg et Bamako), en Afrique, en Europe, aux États-Unis, à Cuba, au Mexique ou encore en Chine.