En marge de son travail de sculpteur et du rôle qu’il joue sur d’importantes manifestations (BISO), Mamadou Ballo a ouvert en 2020 ses premières résidences d’artistes. Accueillir des créateurs, ce n’est pas seulement leur offrir un toit ou un atelier. Il s’agit de créer une dynamique, de donner du sens à ce séjour, mais en laissant leur liberté s’exprimer. Un subtil équilibre de propositions, de mise à disposition et d’ouvertures. A chacun(e) de remplir ensuite la toile et le volume. Interview.
Tu développes depuis un an des résidences en Afrique. Où les possibilités sont de plus en plus nombreuses ? La particularité d’un accueil, ici, sur le Continent ?
Je pense qu’il n’y a pas plusieurs mondes, mais un seul. Les distances n’existent plus. On prend un avion et on y est. Mais en même temps, on revient à certaines choses, parce qu’on sent qu’elles ont des choses à nous dire. Certains artistes ont vraiment besoin de connaître physiquement, pour prendre de la compréhension profonde. Venir ici, c’est ça. Ils ont les gestes souvent, mais ils veulent comprendre.
Cette année, premiers résidents donc. Des choses qui t’ont marqué ? Leurs attentes, par exemple…
Honoré Dion qui est plasticien, ça m’a beaucoup intéressé. Il laisse sa femme et ses enfants à Abidjan. Dans son idée, il doit rester trois ou quatre jours maximum, et au final, ça va durer trois semaines. Parce qu’il est bien pour travailler, simplement. L’autre exemple, c’est Rachelle qui vient pour faire des cadres. Parce que c’est la création, mais ce qu’il y a autour aussi. Tendre ses toiles, c’est pas évident, il y a des choses à maîtriser. Donc ils étaient trois : Dion Banda (peintre), Gbahi Rachelle Flaure Blé (plasticienne) et Zoro Zipa ( graffeur). Trois univers différents et un endroit où ils se posent.





Tu es très attaché à ce que la résidence offre un maximum de possibilités… Ça passe par les médiums.
Oui, il y a la peinture et la sculpture, mais je voudrais rester le plus ouvert possible. C’est bien que la photographie soit présente et le numérique aussi. Et en même temps de mettre des outils à disposition, par exemple pour la menuiserie… Je me souviens avoir connu des difficultés, parce que je n’avais pas les outils. Donc on va rendre les choses possibles. Mais en même temps, que les participants restent libres et qu’ils fassent eux-mêmes leur chemin.
Autour de toi, comment ça se passe ? Le cadre déjà, c’est important…
On est vraiment dans un coin tranquille. Quarante-cinq kilomètres d’Abidjan, sur la route de Yaou, un grand terrain, une belle cour et une petite maison, avec les chambres et le séjour. Antoinette fait la cuisine ici. C’est important la cuisine ! Honoré s’occupe de la logistique et Rachel la sélection. Très important que ce soit une femme, parce qu’elle a cette compréhension des autres. C’est également une chose à laquelle on est attentif, qu’il y ait une femme dans chaque accueil, un artiste confirmé, et un jeune qui grandit. Que les choses s’équilibrent bien. Personnellement, ce que je voulais, c’est d’être là, mais sans y être. Juste pour ce qu’il fallait.
Dans une interview, tu disais que cette première résidence t’avait apporté une satisfaction morale. Tu peux revenir sur cette idée ?
On a franchi un pas, le projet a pris corps et c’est important pour le bien-être des artistes contemporains. Dans la mesure où il entre dans la construction totale de leur carrière artistique. Ensuite, j’éprouve une réelle satisfaction au regard des résultats. Nous n’avions pas identifié de thème et chacun était libre dans sa recherche. Et ça a très bien fonctionné. Enfin, et c’est aussi ça une résidence, de voir que les échanges entre eux et aussi avec nous ont été fructueux. Et que ça ait fonctionné. Ensemble.
Recueilli par RC (ZO mag’)
Photos ©Mamadou Ballo
Contacts : Résidence artistique Mamadou Ballo, Bonoua (Côte d’Ivoire).
Tél. : +225 541 49 127
E-mail : artballo@yahoo.com