Nigeria / Atelier / Bob-nosa Uwagboe / C’EST ICI QUE LE VOYAGE COMMENCE

Dis-moi à quoi ressemble ton atelier ? La question est un peu indiscrète et les artistes n’y répondent pas tous. L’espace est intime, au-delà de la seule création. Il génère quantité de sentiments, de décisions, de mots et de silence. Bob-nosa nous a ouvert le sien. Des éléments, une volonté, beaucoup de simplicité.

Lors de sa résidence en Pologne, l’été dernier, le sujet a alimenté nombre de conversations avec Malgorzata Paszylka. Celle-ci a d’ailleurs écrit quelques lignes qui résument bien ces multiples incertitudes. « L’atelier n’est pas seulement un lieu au sens matériel, où s’entassent les cartons, les toiles, mortiers, peintures, diluants, vernis, chevalets, pinceaux divers, rouleaux à peinture, mastics et palettes…. Ce n’est pas uniquement un lieu où l’on peint. Mais un lieu de contemplation, de réflexion, où viennent le doute, l’apaisement,la colère parfois… et même les combats. »

Bob-nosa a une vision très proche de ça. Depuis sa fenêtre, ce n’est pas la vue qui lui apporte l’inspiration. Carré gris (mur) sur fond bleu (ciel). Mais dans la fibre même du lieu, il reconnaît une potentialité permanente. « C’est un endroit où je peux venir n’importe quand. Rester des heures, la nuit entière, dormir sur le lit, travailler bien sûr, ou bien méditer, lire, écouter du reggae. » L’envisage-t-il comme un lieu solitaire ou de rencontres ? « Je dirais un lieu solitaire. Mais dans la perspective d’une création sociale. Ensuite, je veux qu’il reste ouvert, que je puisse accompagner ici des jeunes artistes, par exemple. »

Bob-nosa a baptisé l’atelier sous le nom de « The Protest Art Studio ». Dans le contexte actuel, au Nigeria, cette affirmation prend une acuité particulière. Protestation et liberté de la couleur, des mots, des thèmes représentés. « Bob-nosa a créé un espace alternatif », poursuit Malgorzata. « Un endroit où recueillir l’énergie créatrice et la détermination » L’endroit est blanc, plutôt vaste et on y retrouve l’équation habituelle des toiles, des couleurs, une minuscule palette, des bombes aérosols, des vêtements coupés, des journaux et des bouteilles. Une bicyclette d’enfant. La fonction première, à savoir la matrice organique, est pleinement préservée. Tout est là, à portée de main, dans un désordre maîtrisé. C’est un laboratoire paré au décollage.

Rien que de très habituel. Puis au centre, un transat et un banc. Ce dernier est là pour les invités. Bob-nosa se réserve l’usage du premier. Une bibliothèque se trouve à portée. Un livre ouvert, nécessaire reconnaissance. Il n’en dit pas plus. D’ailleurs il parle assez peu. Les choses sont là et se disent par elles-mêmes. La petite musique des objets. « Parfois, il est assis là, pendant des heures, écoutant de la musique et contemplant (…). Et puis, il y a ce mur et l’inscription « The Protest Art Studio ». C’est son endroit favori. » Comme la coursive d’un bateau, comme un horizon qui s’ouvre et confirme la trajectoire. L’atelier devient une passerelle. Le meilleur raccourci entre deux mondes. Le dedans et le dehors.

Roger Calmé (ZO mag’)
Photos : © Bob-nosa Uwagboe
Remerciements à Malgorzata Paszylka

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