Faudra pas pleurnicher quand le réservoir va exploser. Badaboum, que ça fera, avec des gerbes de bouillasse dans le ciel équatorial. Kinshasa, charmante agglomération, présente de grosses fissures au niveau du réacteur N° 4. Quelques émissaires courageux, vêtus de pneus, des fous couverts de hardes et de bassines, parcourent les rues. Ils le disent haut et fort : ça va péter ! En 2012 déjà, avec ses copains de Kin Act, Billy Ngalamulume se campait sous le monument Lumumba et poussait le message.
La ville a faim, la ville a soif, la nuit est noire, et le fleuve coule, rempli de mercure. Messages sociaux, information de base, quand l’institutionnel détourne le regard. Ces cinq dernières années, Billy est devenu Kill Bill, personnage emblématique de l’alternative consciente.
Sa dernière création, sortie en octobre 2019, dans les rues de Matete, enfilait la combinaison mortelle du temps. Du raphia, de la durite pour l’alimentation en CO2, du plastoc fondu, et cette horloge qui fait tic-tac. Fichue minuterie branchée sur les explosifs, camouflés dans cette insalubre attente.
« 𝘓𝘦 𝘵𝘦𝘮𝘱𝘴 𝘯𝘰𝘶𝘴 𝘣𝘰𝘶𝘧𝘧𝘦, » disait un jour Bill, « 𝘤’𝘦𝘴𝘵 𝘢𝘴𝘴𝘢𝘴𝘴𝘪𝘯, 𝘤’𝘦𝘴𝘵 𝘮𝘦𝘶𝘳𝘵𝘳𝘪𝘦𝘳, 𝘭𝘦𝘴 𝘦𝘯𝘧𝘢𝘯𝘵𝘴, 𝘭𝘦𝘴 𝘮𝘢𝘮𝘢𝘯𝘴, 𝘱𝘦𝘳𝘴𝘰𝘯𝘯𝘦 𝘯’𝘺 𝘦́𝘤𝘩𝘢𝘱𝘱𝘦. 𝘊’𝘦𝘴𝘵 𝘱𝘢𝘴 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘱𝘰𝘭𝘪𝘵𝘪𝘲𝘶𝘦, 𝘤’𝘦𝘴𝘵 𝘭𝘦 𝘤𝘰𝘯𝘴𝘵𝘢𝘵, 𝘮𝘢𝘯. » Et sa main mécanique montre les hôpitaux, et le fleuve majestueux, et le crépuscule tant redouté. Cette année encore, Bill était dans la rue, et puis au vernissage d’une expo, dans son bandage de grand blessé, rouge de sang et noir de ciment. Emmuré vivant.Tout comme Zeka, Papenoire ou Eddy Ekete, comme tous les super-héros, il y a un type ou une fille à l’intérieur de cette combinaison qui se pose les bonnes questions. Peut-on encore éviter le cauchemar ?
Roger Calmé (ABA mag’)
Photo : DR et © Billy Ngalamulume
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