Elément central, à haute valeur (symbolique) ajoutée. Le tissage est permanent chez les artistes du Continent. Nul besoin de revenir sur la raison. Utilisation fondatrice. L’histoire et le tissu ont tellement de choses en commun. L’histoire est un tissu usagé, un travail qui se fait et se défait, un patchwork de pièces et de rapièces. Filippus Sheehama travaille donc de cette façon. Il tisse ce qui lui tombe sous la main. Et là encore, le choix des éléments n’est pas gratuit.
La Namibie ( pour en revenir à l’histoire) a eu une existence malmenée. On parle immanquablement de l’Afrique du sud et de l’apartheid, mais on passe sous silence la même période en Namibie. Pourtant, le pays l’a vécue de manière similaire. Avec la même cruauté et le même silence imposé. Filippus Sheehama travaille à la recouvrance de cette mémoire. Avec des noix de makalami (petites coques résonantes), avec des capsules de coca et de bière (petites coques écrasées), avec des bouts de carton et de raphia : il refait les collages originels et parle de la misère coloniale.
« L’exploration des plastiques comme métaphore visuelle de la pauvreté. » Car c’est bien de cela qu’il s’agit. De cette abyssale pauvreté et du silence imposé…
Éducateur, en plus d’être peintre et plasticien, il continue de marcher dans la vie réelle. Ses ateliers avec des enfants et des jeunes adultes lui permettent de mesurer la profondeur du fossé et l’ampleur des inégalités. En 2015, il présentait une exposition intitulée : « L’exploration des plastiques comme métaphore visuelle de la pauvreté. » Car c’est bien de cela qu’il s’agit. De cette abyssale pauvreté et du silence imposé, au travers des époques, du temps maquillé, des morceaux de tissus qui cachent (un moment) la misère.
Visible durant ces quelques jours sur la foire virtuelle « Turbine art fair », en même temps que Elisia Nghidishange, Nicky Marais, vous pouvez (enfin) découvrir ses recherches. On vous reparlera de cette galerie, StArt qui l’expose et défend les créateurs namibiens. Pour Fillipus, c’est une chance de visibilité, mais pas seulement. Il le dit dans sa peinture de tous les jours, l’occasion de redire l’histoire dans le bon sens. D’offrir la lecture possible à celles et ceux qui veulent lire.

Roger Calmé (ZO mag’)
Photos : DR et © Fillipus Sheehama
Strat art gallery : info@startartgallery.com. Tél. : +264 81 831 6306
Facebook : @startartnam https://turbineartfair.co.za/artists/
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